Confidences d'une femme trahie

Introduction aux Confidences d'une femme trahie 
Dans les Femmes savantes de Molière, Philaminte, femme de Chrysale, mère d’Armande et d’Henriette est une despote dont l’autoritarisme fait tout plier à ses volontés. Comme le disait Henriette à propos de sa mère Philaminte:  
C’est elle qui gouverne, et d’un ton absolu
Elle dicte pour loi ce qu’elle a résolu.
Chrysale, le mari, à propos de sa femme Philaminte, disait en exagérant à peine :

Pour peu que l’on s’oppose à ce que veut sa tête,
On en a pour huit jours d’effroyable tempête.
Elle me fait trembler dès qu’elle prend son ton ;
Je ne sais où me mettre, et c’est un vrai dragon."
Sa Majesté la Reine du décorum ressemblait à Philaminte.

Extrait de la préface de Le coup de grâce (1939), roman de Marguerite Yourcenar. Ces remarques sont à mettre en relation avec les Confidences d'une femme trahie.
Ces confidences s’inspirent d’une occurrence authentique. Le récit est écrit à la première personne, et mis dans la bouche du personnage principal, procédé auquel j’ai recours parce qu’il élimine du livre le point de vue de l’auteur, ou du moins ses commentaires, et parce qu’il permet de montrer un être humain faisant face à sa vie, et s’efforçant plus ou moins honnêtement de l’expliquer, et d’abord de s’en souvenir. Rappelons pourtant qu’un tel récit fait par un personnage est quoi qu’on fasse une convention littéraire. Une fois admise, néanmoins, cette convention initiale, il dépend de l’auteur d’un récit de ce genre d’y mettre tout un être avec ses qualités et ses défauts exprimés par ses propres tics de langage, ses jugements justes ou faux, et les préjugés qu’il ne sait pas qu’il a, ses mensonges qui avouent ou ses aveux qui sont des mensonges, ses réticences, et même ses oublis. Mais une telle forme littéraire a le défaut de demander plus que tout autre la collaboration du lecteur ; elle oblige à redresser les événements et les êtres vus à travers le personnage qui dit je comme des objets vus à travers l’eau. Ce biais favorise l’individu qui est ainsi censé s’exprimer. C’est, comme on le pense bien, dans les rapports compliqués interpersonnels que se marque le plus cet écart entre l’image que le narrateur trace de soi-même et ce qu’il est, ou ce qu’il a été. C’est pour sa valeur de document humain (s’il en a) et non politique, que ce court roman a été écrit et c’est de cette façon qu’il doit être jugé. (Marguerite Yourcenar)
Il est bien vrai que ce biais favorise l’individu qui s’exprime. Le reste du livre permet de corriger cette impression.

aire de repos
La confession généreuse et libre énerve le reproche et désarme l’injure. (Essais, III, 9)
De toutes les rêveries du monde, la plus reçue et plus universelle est le soin de la réputation et de la gloire, que nous épousons jusques à quitter les richesses, le repos, la vie et la santé qui sont biens effectuels et substantiels, pour suivre cette vaine image et cette simple voix qui n’a ni corps ni prise.  (Essais, I, 41)
Enivrez-vous. Il est l’heure de s’enivrer. Enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise.  ( Baudelaire, cité dans une lettre prémonitoire envoyée par la directrice à tout le personnel du collège. )
Comme en matière de bienfaits, de même en matière de méfaits, c’est parfois satisfaction que la seule confession. Est-il quelque laideur au faillir, qui nous dispense de nous en confesser ? (Montaigne)
     
note liminaire du Littéraire

Le temps est venu de donner la parole à l'Autre et de respecter un principe du droit popularisé par Bernard Landry : audi alteram partem, écoute l’autre partie. C'est ce que Landry a dit piteusement pour une très faible défense de Jacques Parizeau qui, en pleine campagne électorale, en réponse à une question plantée de l'auditoire d’un collège, a bien été obligé de revenir sur l'argent et des votes ethniques
Les confidences de la directrice donnent l’occasion de revivre le conflit tel qu’il s’est déroulé  dans le temps à travers sa façon de voir les choses. Comme s’il écrivait un roman à la première personne, l’auteur (Le Littéraire) s’est mis à la place de Sa Majesté qui, comme un personnage fictif, dit je et raconte toute l’histoire telle qu’elle l’a vécue en respectant la chronologie. Vous verrez qu’elle n’est pas du genre à douter d'elle-même. Quoiqu’on ne sait jamais, le caractère fictif de ce personnage peut nous réserver des surprises. C’est la directrice qui s’exprime : le je, c’est elle.  Je la vois comme un mélange du personnage de Philaminte des Femmes savantes, de Célimène du Misanthrope de Molière et de la marquise de Merteuil des Liaisons dangereuses mais quand même un peu moins cynique, dépravée et méchante que cette dernière. Mais la ressemblance à un modèle n'est pas une identification totale au modèle. Je le répète: c'est un personnage fictif, réaliste mais fictif.  Je ne me suis pas pris pour Balzac ou Flaubert. Mais j’ai cédé aux pressions de ma conjointe qui voulait que j’écrive un roman pas un essai.

La bourgeoise qui racontera son expérience est un personnage fictif qui est sans doute différent de la personne réelle qui l’a inspiré et qui a servi de modèle.  On ne peut pas dire toutefois que certaines ressemblances sont le fruit du hasard mais l’auteur de cet ouvrage revendique une liberté  qui l’a autorisé à certaines inventions. (Le Littéraire)


Confidences d’une femme trahie 

entrée: portrait du Littéraire dit Boutefeu 
Je commencerai par un portrait de mon adversaire. Lucien Bouchard a déjà dit que Stéphane Dion était un boutefeu. C'était la première fois que j'entendais ce mot.  Bouter le feu, mettre le feu. Le mot boutefeu désigne un bâton garni à son extrémité d’une mèche pour mettre le feu à une pièce d’artillerie. Par un développement métonymique, on est passé à la personne qui met le feu et, par extension, à incendiaire. De nos jours, le mot ne s’emploie qu’avec son sens figuré de personne suscitant des querelles ou des conflits.  Boutefeu est le nom fictif que je donne au Littéraire.  Le surnom de Boutefeu lui convient bien car il était, de fait, une personne suscitant des querelles et des conflits.  Par son intransigeance, son complexe de supériorité, son agressivité, son approche belliqueuse, son utilisation de mots blessants, sa volonté de nous faire perdre toute crédibilité, ses sarcasmes, sa désinvolture arrogante, sa manie de tout politiser, il a été le principal responsable de la guerre de sept ans que j’ai dû subir. Tout ce qui est arrivé est de sa faute. C'est lui qui nous a poussé à utiliser l'arme nucléaire des poursuites judiciaires. Dans la chicane, il était comme un poisson dans l'eau . C'est lui le responsable pas moi. Je n'ai fait que me défendre. Son opposition systématique était intolérable.
Pour lui, j’étais la libérale qui, avec la clique de Ste-Anne-de-Sorel, complotait contre lui et voulait l’abattre depuis toujours. C’est un rebelle et un provocateur depuis longtemps. Il déteste les libéraux. Il a détesté  Robert Bourassa, Pierre Elliott Trudeau, Jean Chrétien et Jean Charest. En plus, c’est un rancunier : une offense qui lui a été faite ne sera jamais oubliée. J’admets qu’il n’a pas été le seul de son camp et du nôtre à aimer la confrontation. Mais je l’ai dès le début considéré comme la bougie d’allumage des affrontements, celui qui met le feu aux poudres, parce que le syndicat se servait beaucoup d’écrits et qu’on reconnaissait partout son style satirique  amplifié par son confrère l’Irlandais qui sait aussi écrire, avec, en prime, des citations de Montaigne qui étaient souvent insultantes pour moi.  Il m’attaquait souvent dans ses cours et cela est inacceptable devant un public captif de jeunes sans défense faciles à manipuler. Par exemple.  Il étudiait le roman de Madame de La Fayette et attirait l'attention sur la citation suivante:  L'humeur ambitieuse de la Reine lui faisait trouver une grande douceur à régner lisait-il dans La Princesse de Clèves. Il commentait en disant: Vous savez que nous avons une Majesté comme directrice générale ici même. Nous sommes là pour qu'elle ne trouve aucune douceur à régner. C'est un tyran tritri décrit dans le Peterson sur les oiseaux. Et il montra aux élèves le tyran tritri dans le Peterson.
Il est vrai que j’ai pris les devants, que j’ai essayé de l’intimider, de le déstabiliser, je l’ai considéré comme le leader à abattre et je l’ai traité comme tel sans lui donner de répit. J’ai d’abord attaqué le Syndicaliste, son ami dont j’ai refusé la candidature au poste de Directeur des études...après l’avoir invité à se présenter. Je l’ai ensuite attaqué directement très tôt à partir d’une plainte. Toutefois, à chacun des coups que je lui donnais, il y a eu une réplique de sa part qui, la plupart du temps, a fait mal car il savait où viser. Mes attaques et ce qu’il appelait mes mesquineries contribuaient encore plus à le motiver plutôt qu’à le décourager. Il disait que chacune de mes actions contre lui était du harcèlement. Ces coups que je lui donnais lui servaient à démontrer ma malveillance et à justifier sa bataille contre moi auprès de ses confrères qui continuaient à l’appuyer puisqu’il était l’objet d’attaques répétées de la Direction. Ses collègues ne pouvaient le laisser seul contre moi qui le harcelais en se servant de tous les moyens à ma disposition ayant sous mes ordres, comme il aimait le répéter, des cadres serviles et des espions obséquieux. Certains de ces êtres troubles du département de philosophie et de français, soit dit en passant, étaient sensibles à mes charmes et je le savais : une femme sent ces choses-là. Certains enseignants jouaient double jeu : ils me flattaient pour obtenir des avantages mais, en même temps, ils donnaient de l’information à mon ennemi. Parfois, je me suis servie d’eux pour passer des messages. Tout  cela jetait de l'huile sur le feu. Il n'y avait pas grand monde qui était totalement de mon bord sauf certains cadres.
Après l’avoir observé et avoir écouté ce qu'on dit de lui,  le principal reproche que je lui adresse, c'est qu'il  politise ses cours et fait de la propagande politique indépendantiste et anti-libérale auprès de jeunes qui forment un auditoire captif. On dit aussi qu'il donne de meilleures notes à ceux qui ont ses idées politiques mais je n'en suis pas sûre. Il devrait donner plus de cours magistraux.  il critique l’administration chaque fois qu'il le peut.  Il accorde peu d’importance au français écrit, (il a dit à un étudiant en techniques administratives très faible en français écrit : quand tu auras réussi en affaires et que tu seras millionnaire, tu engageras une secrétaire forte en français et le tour sera joué). Cette désinvolture fait mal paraître ses confrères plus exigeants.
Quand un train siffle, il va vers la fenêtre et se met à réciter par coeur, sans avertissement,  devant ses élèves abasourdis, le poème Le voyage de Baudelaire en laissant clairement entendre qu’il aimerait mieux être ailleurs. Voici ce poème. Je prends plaisir à l'imaginer en train de le réciter. 
Le Voyage
Pour l’enfant, amoureux de cartes et d’estampes,
L’univers est égal à son vaste appétit.
Ah ! que le monde est grand à la clarté des lampes !
Aux yeux du souvenir que le monde est petit !
Un matin nous partons, le cerveau plein de flamme,
Le coeur gros de rancune et de désirs amers,
Et nous allons, suivant le rythme de la lame,
Berçant notre infini sur le fini des mers :
Les uns, joyeux de fuir une patrie infâme ;
D’autres, l’horreur de leurs berceaux, et quelques-uns,
Astrologues noyés dans les yeux d’une femme,
La Circé tyrannique aux dangereux parfums.

Ah partir pour partir !
Quand, à l’automne, en fin d'après-midi,  la noirceur tombait, après avoir dit assez prosaïquement pour fustiger le bilinguisme canadien, comme dans les aéroports :  Your'e attention please, Votre attention s'il vous plaît, il récitait d’une voix basse de confessionnal (il a été séminariste comme Aliocha dans les Frères Karamazov) le poème Recueillement de Charles Baudelaire, j’aurais aimé être là dans sa classe pour voir moi-même ce professeur assez spécial.
Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici :
Une atmosphère obscure enveloppe la ville,
Aux uns portant la paix, aux autres le souci.
Pendant que des mortels la multitude vile,
Sous le fouet du Plaisir, ce bourreau sans merci,
Va cueillir des remords dans la fête servile,
Ma Douleur, donne-moi la main ; viens par ici,
Loin d’eux. Vois se pencher les défuntes Années,
Sur les balcons du ciel, en robes surannées ;
Surgir du fond des eaux le Regret souriant ;

Après avoir ainsi impressionné ses élèves avec le fouet du Plaisir et la fête servile, il ajoutait, cela m'a été raconté: 
Si je faisais de la prison, j’en profiterais pour puiser dans les trésors de ma mémoire. Je ne m’ennuierais pas une seconde. D’ailleurs, suite à la manifestation de la St-Jean du 24 juin 1968 que la police qualifiait d’émeute, j’ai passé vingt-quatre heures en prison, au quartier général de la police dans le Vieux-Montréal, dans la même cellule que Pierre Bourgault. J’ai payé une amende de cinquante dollars suivant ainsi les conseils de mon avocat Serge Ménard (ex-député du Bloc québécois à Ottawa qui s'est vu offrir une enveloppe de 10,000 $ par le corrupteur libéral, maire de Laval et qu'il a refusée) pour avoir troublé la paix en face de la bibliothèque de Montréal au parc Lafontaine là où a eu lieu l’émeute, au moment même de l’émeute et je n’ai pas participé à l’émeute. Expliquez-moi ça. C’est un de ces miracles du droit. Dans les cellules du quartier général de la police dans le bas de la ville de Montréal, en début de soirée, Pierre Bourgault parlait des Patriotes de 1838. Puis quand on entendit des rumeurs qu’un policier était mort dans la manifestation et après avoir vu Reggie Chartrand qui avait la face comme s’il était passé dans un nid d’abeilles, Bourgault devint songeur et se tut.
Vous aurez deviné que la Circé tyrannique aux dangereux parfums, c'est moi. En retournant chez lui dans le Vieux-Longueuil, chaque soir, il évitait de voir les retombées de ses audaces verbales. Il échappait ainsi, selon lui, à un milieu fermé et lourd où régnait le dénigrement. Ce dénigrement existait au coeur même du département de français.  Son inconscience l’a parfois sauvé et ses amis aussi.  Je me suis informé sur lui: c'est facile car il parle volontiers de lui devant ses élèves. Ce n'est pas un hasard s'il a fait sa thèse de doctorat sur l'autobiographie.  Un p'tit gars du bas de la ville de Montréal qui nous nargue en citant Montaigne, muni d’une maîtrise en théologie de l’Université de Montréal et d’un doctorat en lettres de l’Université Laval,  avec des talents d’écrivain polémiste et un goût marqué pour les affrontements, Boutefeu a eu, dans ses belles années, m'a-t-on dit,  un handicap de six au golf, une moyenne de 400 au baseball de dix à seize ans et de 600 à la balle donnée au Grand Séminaire de Montréal et au camping de La Tuque.  Il prétendait que la Canada Cup était la meilleure balle pour le golf d’automne. Il disait : Frapper sur le Canada, quel plaisir! Il aurait sans doute aimé avoir une balle à mon nom. Dans ses diatribes politiques, il commençait en citant Réjean Ducharme (il avait fait sa thèse de maîtrise en lettres sur l’Avalée des avalés, roman publié chez Gallimard) : Parlons du Canada. Déployons de mornes efforts. C'était un indépendantiste militant.  Avec ténacité et acharnement. Il était très critique à l'endroit de ceux qu'il appelait les pourris fédéralistes qui sont des tricheurs pratiquant le terrorisme économique. Robert Bourassa était sa tête de Turc. Il le détestait. Dans ses livres, il le fustige. Il admire Jean-François Lisée qui a écrit deux essais qu’il qualifie de magistraux contre Robert Bourassa: Le Tricheur et le Naufrageur.
Décorum
Boutefeu m'appelait la Reine du décorum. Le décorum est l’ensemble des règles qu’il faut observer pour tenir son rang dans la bonne société. C’est ce qui relève des convenances, de la bienséance, du cérémonial, du protocole, de l’étiquette, du savoir-vivre, des bonnes manières, de la civilité, de la courtoisie On m’a beaucoup reproché de tenir au décorum en tout temps.   Il faut être capable d’exprimer un désaccord sans manquer de respect pour les autorités. C’est une question de savoir-vivre et de politesse.
Pendant les réunions du Conseil d’administration du collège, j'ai toujours exigé le respect du décorum. Cela a frustré le syndicat des enseignants qui nous a appelée la Reine du décorum pour laisser entendre que, pour nous, l’apparence avait plus d’importance que la substance et que nous voulions la soumission de tous comme une reine au pouvoir absolu. Si, à cause de mon autorité, de ma prestance et de mon attitude majestueuse, mes adversaires m’ont qualifiée de reine, pourquoi n’en serais-je pas flattée malgré l’intention satirique évidente et la suggestion que j’étais une dominatrice, une despote. Boutefeu aimait spécialement le mot despote à cause du son du mot. Mes espions m’ont dit qu'il m’appelait une Louis XIV en jupon. Il avait du goût pour l’hyperbole. Il appelait mon bureau : le Carré royal qui est le nom d’un parc de Sorel. On m’excusera de ne pas trouver ça drôle. Bien sûr, une directrice générale a un certain pouvoir. Il m’appelait d’un nom d’oiseau, le tyran tri tri et me comparaît à Philaminte, le personnage despotique des Femmes savantes de Molière. Il me comparaît aussi à Célimène, du Misanthrope, la séductrice qui laisse croire à quatre hommes en même temps qu’elle pourrait être intéressée par leurs avances. A bien y penser, par sa franchise brutale et incivile et son intransigeance, Boutefeu avait un côté viril misanthrope et misogyne. Le Dr Mailloux aurait aimé cette virilité.  C’était me direz-vous, un affronteur. Je le crois. Ça tombe bien, je suis, moi aussi, une affronteuse. Féru de Montaigne, il aimait agrémenter les textes syndicaux de citations qui projetaient dans l’universel des situations locales que certains bon ententistes tentaient de minimiser. La culture, ça ne donne pas le droit d’insulter les gens en les affublant de noms comme  Tyran tri tri et ça ne donne pas d’immunité. Un de mes espions m'a rapporté que dans un de ses moments de colère, il m'a comparé à la cynique, pervertie et méchante marquise de Merteuil, l'héroïne des Liaisons dangereuses. Philaminte oui, à la rigueur, Célimène oui, certainement, mais la marquise de Merteuil, non: là, il charriait.

Confidences d’une femme trahie
Je vais raconter avec franchise toute l'histoire des poursuites telle que je l'ai vécue. C’est devant le majestueux fleuve Saint-Laurent que j’entreprends la rédaction de ces confidences avec l’intention d’être la plus honnête possible sans dramatiser mais sans minimiser le long conflit qui a duré sept ans, qui m’a opposée au Littéraire et au syndicat des enseignants et qui m’a rendu la vie misérable. Pour moi toutefois, le bilan des sept années que j’ai passées à la direction du collège de ma région est positif. Personne ne niera que j’ai laissé ce collège dans un meilleur état que je ne l’avais trouvé. Je mets quiconque au défi de prouver le contraire. Le leader négatif qui m’a mis les bâtons dans les roues pendant sept ans aura-t-il la lucidité et l’honnêteté de l’admettre ! Non, bien sûr, il en est incapable. Bien que je ne me fasse aucune illusion sur sa capacité d’être objectif qui lui ferait reconnaître mes réalisations faites dans un contexte rendu difficile par l’opposition systématique des syndicats du collège, en particulier le syndicat des enseignants, j’ai atteint une certaine sérénité qui ne m’empêchera pas toutefois d’exprimer mon mécontentement dans le récit que je ferai des événements. Je ne jouerai pas à l’impassible et je n’ai pas l’intention de cacher mes sentiments. Je  serai sans complaisance. J’ai écrit des rapports annuels qui décrivent mes réalisations. Même si, dans ces rapports, je ne parlais pas des situations tendues provoquées par mes décisions et par mon style volontariste, ces rapports annuels étaient sans doute incomplets mais ils étaient exacts et véridiques. Je suis fière de mes réalisations. Le collège est plus beau physiquement, il sent meilleur (j'ai interdit la cigarette au grand plaisir du Littéraire qui a horreur de la nicotine) et bien que sa réputation soit entachée par toutes ces controverses, il existe dans l'opinion comme un lieu où la réussite nous tient à coeur et où l'étudiant, c'est important comme le dit si bien le slogan du collège. 
Malgré des frustrations normales, je n’éprouve aucune haine envers le Littéraire et les autres membres de l’exécutif syndical et je ne ressens pas le désir de me venger de quelque manière que ce soit. Ce ne serait pas digne de moi. Le passé est derrière moi.  J’éprouve même pour Le Littéraire une certaine admiration pour sa culture, sa pugnacité, son esprit rusé et même pour son côté rebelle qui me rappelle les belles années de mon adolescence. Est-ce que j’insinue qu’il manquait de maturité ? Oui, je le pense. Sans l’ombre d’un doute, c’est un fanatique qui politise tout, en tout temps. Mais, il n’a pas à s’inquiéter, s’il écrit sur le sujet des poursuites, je ne le poursuivrai pas. Je ne lui ferai pas ce plaisir qui contribuerait à en faire un martyr, à le mettre en vedette encore une fois, à lui faire de la publicité gratuite et à lui donner l’occasion de dire : Vous voyez, je vous l’avais bien dit, c’est une quérulente. Elle est tout à fait incapable de s’insérer dans la vie sociale sans passer par la menace des Tribunaux. Il lui faut semer la crainte pour dominer. Non, je ne lui donnerai pas la chance de me dénigrer ainsi. Mais s'il essaie de publier des extraits de son livre qui me dénigrent dans les journaux locaux ou sur le Sorel-Tracy Magazine, j'interviendrai et j'irai jusqu'à faire des menaces auprès de Jean Doyon pour préserver ma réputation.  
Je suis une femme heureuse, épanouie à tous les points de vue comme dirait Maud, le personnage d'un film d'Eric Rhomer. Je suis bien dans mon corps et sans complexe. A cause de leur arrogance et de leur ton belliqueux, j’admets que je voulais écraser mes adversaires et que j’ai échoué. Il y a eu des coups bas de part et d’autre, mais j’estime que, tout compte fait, ce fut un combat loyal qui a causé des blessures mais n’a pas vraiment fait de vainqueur ni de victime et n’a pas causé de drame. Certes, les pauvres petits ont été troublés par les visites du huissier. Mais quel mal y a-t-il à ce qu’un avocat local ait obtenu des honoraires raisonnables: les  avocats aussi ont le droit de gagner leur vie et nous vivons dans une société de droit où on peut recourir aux tribunaux quand certaines personnes dépassent les bornes de la décence.  Des deux côtés, les moyens juridiques ont été utilisés jusqu’à se neutraliser les uns les autres : c’est pour cela qu’il y a eu une entente hors cour. C’est mon opinion et j’y ai droit car ils n’ont pas le monopole, à ce que je sache, de l’intégrité et du dévouement malgré le dialogue de sourds qui a prévalu pendant toutes ces années où j’étais personnellement au faîte de ma maturité et en pleine possession de mes moyens. Je le dis sans flagornerie car il fallait une bonne dose de confiance en soi pour accepter le poste de directrice générale de ce collège après avoir été pendant plus de vingt ans, dans d’autres collèges, enseignante, conseillère pédagogique, adjointe puis directrice des études. Heureusement que mes amis m’ont appuyée, ceux que Le Littéraire appelle avec mépris, la clique puisque la réussite économique ne l’impressionne pas. Ils sont comme ça, les intellectuels québécois
Je n’entretiens pas d’animosité personnelle contre mes opposants surtout pas envers mon principal adversaire dont j’avais fait, paraît-il, une obsession. Il est vrai que je le voyais dans ma soupe. Il avait le don de m’indisposer et je crois qu’il le faisait exprès. Comme on dit en anglais: He knew how to get under my skin. Il savait comment me faire enrager. Un peu délinquant, il avait de la difficulté à respecter l’autorité. Il avait l’art de la provocation. Toute intervention de la Direction pour neutraliser ses attaques était considérée comme un abus de pouvoir. Ce qui me dérangeait le plus, à part les calomnies et les insultes, c’était que la méfiance et l’hostilité de mes adversaires créaient un si mauvais climat que ma capacité d’initiative et mon esprit d’innovation en étaient inhibés. Peu importe ce que je voulais faire, c’était toujours mal reçu et mal perçu. C’était particulièrement frappant avant les conseils d’administration où, membre du Conseil comme représentant des enseignants, il ajoutait à la dernière minute des points à l’ordre du jour juste pour m’embêter. Ma secrétaire me l'a dit: en lui dictant les changements à l'ordre du jour, il avait un malin sourire. Il avait l’attitude de l’opposition à l’Assemblée nationale ce qui n’est pas compatible avec le rôle d’un administrateur dans un collège public. Il devrait être interdit à un vice-président du syndicat des enseignants de siéger au conseil d’administration d’un collège. Il était en conflit d’intérêts et je crois qu’il le savait et s’en servait pour essayer de me compliquer la vie. Ce qu'il a réussi à faire.  Les règles du jeu étaient mauvaises et il en a abusé. Moi aussi, dans ces circonstances anormales, j’ai tordu les règles du jeu en ma faveur surtout pour obtenir, après cinq ans, un renouvellement de mandat pour cinq autres années.  L'évaluation de mes quatre premières années par les enseignants a été rendue publique alors qu’elle aurait dû rester confidentielle. Cela m'a complètement déstabilisée. Cette évaluation était injuste. 
Les poursuites judiciaires, c’est derrière moi, c’est bien fini. J’ai eu ma leçon. Je n’ai plus le gros orteil aussi sensible. Quérulente je fus peut-être, quérulente je ne suis plus. A force de recevoir des coups, on porte une carapace. Etre affectée par des attaques, c’est accorder trop d’importance à ceux qui les font. Ayant pris ma retraite et ayant terminé l’écriture de ces confidences, je pars en voyage pour Vienne et Dubrovnik, mais je n’ai pas emporté dans mes bagages le poids de ces affrontements qui ont miné mes énergies. Je suis une femme d’action dynamique et ambitieuse qui retombe toujours sur ses pieds après une épreuve. Parce que je suis dévouée et que j’ai des objectifs précis. Comme vous le voyez, je ne fais pas preuve de fausse modestie. Je suis consciente de ma valeur (ce qui gêne plusieurs personnes des deux sexes de la région) et je l’ai démontré en tenant tête à ces effrontés que je préfère toutefois aux nombreux lèche-culs qui m’ont beaucoup plus nui qu’autre chose. Si vous voulez m’insulter, dites que je suis une frustrée. On m’a rapporté que mes adversaires disaient de moi que je n’étais pas contrôlable. Que j’étais une espèce de folle quoi ! Il s’en est fallu de peu qu’ils me traitent d’hystérique mais ils n'ont pas osé de peur de se faire traiter par les féministes de misogynes ou de male chauvinist pig, ce qu'ils étaient au fond.  Vous voyez qu’ils ne reculaient devant rien pour me rabaisser. Mais ils n’ont pas réussi à m’intimider.
Après cette introduction où je viens quand même de me défouler un peu, entrons dans le vif du sujet.  Je vais raconter ce qui est arrivé avec franchise et honnêteté. Si j’insiste sur l’honnêteté, c’est parce qu’à plusieurs reprises mes adversaires m’ont accusée de duperie, de malhonnêteté intellectuelle et de machiavélisme. Ils transformaient des divergences d’opinion ou de stratégie en jugements éthiques, ce qui justifiait, selon eux, leur intransigeance. Ils croyaient avoir le droit d’employer des mots blessants parce que, selon eux, je ne méritais pas le respect puisque j'étais malhonnête et dictateure. Ce sont des mots à ne pas employer à la légère. La pugnacité syndicale ne justifie pas tout. Ils méritaient une leçon de savoir-vivre. Il y a des limites à ne pas dépasser sinon il faut s’attendre à des représailles. A leur décharge, je dois admettre que lors des réunions du Comité des relations du travail, appelé familièrement le CRT, l’adjoint à l’organisation scolaire qu’ils appelaient drôlement Grandpied, était particulièrement maladroit. Le moins qu’on puisse dire, c’est que le porte-parole patronal manquait de finesse. Cet ancien professeur d'informatique se comportait comme un rustre qui se croyait mandaté pour faire des jobs de bras. Comme il avait l’ambition de devenir Directeur des études, il faisait tout pour me plaire. Alors, il en faisait trop et, en bout de ligne, il me nuisait par son manque de jugement. Certain d’avoir mon appui, il disait n’importe quoi pour défendre nos positions et les vis-à-vis syndicaux, qui en avaient vu d’autres, le trouvaient de mauvaise foi. C’était difficile de tripoter les chiffres ou d’inventer de nouvelles directives (non-écrites) du Ministère pour justifier une diminution des ressources à l’enseignement en s’imaginant que cela passerait comme une lettre à la poste. De là est venu son surnom de Grandpied auquel le syndicat ajoutait dans les plats. Difficile de ne pas sourire devant ce surnom qui lui allait si bien.
Cet adjoint qui mesurait 6’4” m’obéissait aveuglément. Je lui avais demandé  de donner un horaire écartelé sur cinq jours au Littéraire qui demeure à Longueuil, à 70Km du collège. Ce qui fut fait même si cela impliquait aussi un horaire sur cinq jours d'une jeune enseignante aussi de Longueuil mère de trois enfants en bas âge, ce qui allait contre le chapitre de la convention collective sur la conciliation famille-travail. Je regrette aujourd'hui d'avoir donné cette directive qui a malheureusement été suivie à la lettre. Le Littéraire m'en a gardé rancune car il a été obligé de coucher dans un motel pour ne pas avoir à voyager cinq jours sur cinq. C'est un genre de mesquinerie qu'il ne m'a jamais pardonné. Quant à Grandpied,   ses ambitions  dépassaient ses talents. Il y avait quelques personnes dans son genre qui en faisaient trop dans l’espoir d’obtenir une promotion comme, par exemple, le représentant des professionnels au Conseil d’administration qui a traité la représentante des étudiants de traître en plein journal local. Ces zélotes m’ont beaucoup plus nui qu’aidé. Peu à peu, la confiance du personnel  déjà fragile s’est effritée et laissa place à son contraire, la méfiance, une méfiance qui transformait chaque réunion du Comité des Relations du Travail en marathon et en bataille rangée avec de longs caucus syndicaux pendant lesquels les quatre membres de l’exécutif du syndicat allaient vérifier les dires de la partie patronale. A leur retour, ça bardait. De mon bureau, j’entendais des éclats de voix car les sept représentants syndicaux discutaient ferme entre eux et s’engueulaient fréquemment avec les trois représentants du Collège. Ils insistaient pour en écrire le plus possible dans les procès-verbaux allant même jusqu’à formuler à notre place la position patronale pour pouvoir avoir des preuves écrites de ce qu’ils appelaient nos manigances et nos détournements de ressources au grand désespoir de l’avocate directrice des ressources humaines qui refusait de mettre le mot détournement (que sa formation d’avocate la portait à juger diffamatoire) dans le procès-verbal même si c’était dicté par la partie syndicale. Ils ont donné beaucoup de fil à retordre aux deux directrices des ressources humaines qui se sont succédé. Ils sont responsables de la démission de celle qui venait de Thetford Mines et qui a été la première engagée à ce poste stratégique à la place du Syndicaliste.
Peu combative et plutôt affable, elle  n’en pouvait plus de se faire agresser par la partie syndicale. Quant à l’avocate qui la remplaça et que j’ai engagée en prévision des poursuites, elle avait beaucoup de difficulté à leur tenir tête et sortait épuisée et enragée de ces réunions. Les affrontements étaient monnaie courante. Il n’y a pas de doute, ils étaient coriaces et manquaient souvent de décorum et de respect envers la partie patronale. Ça frôlait l’impolitesse. Ce n’était pas des gentilshommes. C’est pour cela que je prévoyais avoir à employer des moyens extraordinaires pour les neutraliser et forcer leur principal leader à démissionner. Ça paraissait que ce pitbull venait du bas de la ville de Montréal. La BMW de la directrice des ressources humaines ne l’impressionnait pas ni ma Chrysler Sebring. Le Littéraire est lui-même très à l’aise financièrement car il a fait un mariage avantageux avec une fille d'une famille célèbre de Longueuil, les Viger, et en plus, on dit de lui qu'il  est radin comme George dans Seinfeld. C'est une comparaison peu flatteuse car George est stressant. On le dit, je crois, par jalousie.

Dans notre région, l’argent ne laisse personne indifférent, inspire toujours le respect... et l’envie, j’en sais quelque chose. Chateaubriand écrivait : La malveillance et le dénigrement sont les deux caractères de l’esprit français. Je me demande parfois si ce propos ne s’applique pas aux gens de ma région comme le laisse entendre le Littéraire. Il est aussi indépendant d’esprit que de fortune. On m’a dit qu’il a déjà utilisé et vendu ses propres livres dans ses cours. Mais c’était il y a longtemps car depuis la réforme de l'enseignement du français de 1992, il enseigne François Villon, Montaigne, Madame de LaFayette et Molière. L’Irlandais aussi ne donnait pas sa place mais il savait un peu plus y mettre les formes. Lors de la journée pédagogique de la rentrée d'automne, volontairement, je n'ai pas souligné son retour au collège après un recyclage de la philosophie à l'anglais à la Concordia University qui dura trois ans. Il ne me l'a jamais pardonné. Quant au Politique, il était fatigant en CRT avec ses régulières mises au point solennelles qui mettaient tout le monde mal à l’aise. Seul l'Herboriste, le président du syndicat, était parlable: je lui ai même proposé un projet de recyclage dans une usine de la région Fer et titane et il a accepté. Ses amis n'ont pas aimé ça et certains enseignants du département d'informatique, plus perspicaces que les autres, se sont même demandé s'il ne jouait pas double jeu. Ils en ont parlé au Littéraire qui devint perplexe et leur dit: Il est quand même de notre côté.
Sauf la lutte collective menée en 1979 pour l’obtention d’un collège neuf qui fut couronnée de succès et à laquelle participèrent le Syndicaliste, l'Herboriste, le Littéraire, le Politique et l’Irlandais, ce qui caractérisa l’administration précédente, ce fut la prudence. Après presque trente ans de ce régime marqué par l’immobilisme, il était temps pour moi de brasser la cage. Quelle aubaine pour une nouvelle administration que ce bas de laine de 2.4 $ millions ramassés pendant vingt-huit ans à coup de restrictions dans les dépenses ! Ces fameux 2.4 $ millions de surplus accumulés allait faire couler beaucoup d’encre et servait à justifier toutes les demandes de tous les syndicats du collège en particulier celles, exagérées, du syndicat des enseignants. Mais c’était mon devoir de dire non et de résister à leur rapacité. J’avais l’impression que le syndicat des enseignants n’avait pas de limites : ils n’arrêtaient pas de dire que les enseignants croulaient sous le fardeau d’une tâche de plus en plus accablante sans réussir à me convaincre, ce qui les mécontentait au plus haut point car ils savaient que je travaillais au moins douze heures par jour, cinq jours par semaine. Ils m’ont donné plus d’une fois l’impression d’être  incapables de faire le moindre compromis.
Je leur ai tenu tête et j’en ai payé le prix, un prix élevé car ce sont des batailleurs articulés aux multiples talents dont celui d’être habiles à manier la langue française puisque deux des quatre membres de l’exécutif du syndicat des enseignants sont des écrivains qui ont publié de nombreux articles de journaux et des livres. Ils étaient cultivés et les citations de Montaigne qui me contrariaient tant ne provenaient pas d’un dictionnaire des citations mais dénotaient une connaissance approfondie du grand écrivain français. Ce qu’on cherche d’abord dans ce qu’on lit, c’est ce qui nous confirme dans ce que nous sommes, ce sont les parallèles qu’on est en mesure d’établir entre sa propre vie et celle de quelqu’un d’autre, écrit Victor-Lévy Beaulieu dans Un loup nommé Yves Thériault. L’à propos des citations de Montaigne greffées à notre conflit était remarquable et a provoqué chez moi à plusieurs reprises une admiration que je devais garder secrète. Le même VLB a aussi écrit et j’allais l’observer chez mes adversaires : Celui qui maîtrise les mots oblige la peur à s’escamoter, force la terreur à décamper, car le Minotaure ne vous domine que si le langage vous fait défaut.
C’est un fait que j’ai essayé de les intimider et j’ai sans doute réussi à les rendre moins arrogants, plus prudents et moins effrontés mais pas moins combatifs. Paradoxalement, je les ai obligés à contrôler leurs excès de langage et leur virulence et cette modération a renforcé leur position aux yeux des enseignants modérés. Je les ai forcés à exprimer leur pensée sans utiliser de mots blessants. Pour ainsi dire, je les ai éduqués. Mais ils apprenaient vite. Et ça c'est retourné contre moi. Ils devinrent plus efficaces car ils contrôlaient mieux leur émotivité. 

Avec l’appui de mes contacts dans les milieux influents de la région, j’ambitionnais depuis longtemps d’obtenir le poste de directrice générale. Je franchis les étapes normales de mon ascension sociale en commençant comme simple professeur de chimie dans un collège. J’ai offert mes services ici au collège pour enseigner la chimie mais je me suis heurté à l’hostilité du mâle dominant du département de chimie, un grossier personnage qui sentait le pot et qui refusa agressivement de m’engager de peur de perdre son petit pouvoir devant une personnalité forte. Je ne dis pas cela par féminisme : c’est la pure vérité. Ce n’est d’ailleurs pas le seul département où sévit un enseignant qui joue au mâle dominant. Il y a des femmes qui trouvent avantage à être dominées. Imaginez, après cinquante ans de féminisme. C'est le cas dans le département de français où le mâle dominant dénigre le Littéraire beaucoup plus compétent que lui.   J’ai aimé enseigner la chimie. Je fus ensuite conseillère pédagogique, adjointe au directeur des études et directrice des études dans différents collèges avant d’être choisie comme directrice générale, avec enthousiasme et à l’unanimité, par un comité de sélection qui réclamait un nouveau style de gestion et me demandait de brasser la cage.
C’est ce que j’ai fait ; je suis une femme d’action : je n’ai pas peur des affrontements et je ne crains pas de déplaire. Ça en prend beaucoup pour m’intimider. Ma fréquentation des hommes d’affaires (mon mari est vice-président d’une multinationale qui, malheureusement, a dû fermer une usine de peinture à Tracy) me permet de jauger à leur juste valeur ces enseignants qui ont une sécurité d’emploi mur à mur, qui ne sont pas toujours conscients des contraintes budgétaires d’un collège ou de l’importance de l’aspect économique dans le fonctionnement d’une société et qui partagent une volonté de changement politique dont ils mesurent mal les conséquences.

Le journal local, ce printemps 1997, a publié un article sur moi signé par la rédactrice en chef Louise Grégoire-Racicot. Elle écrit:   

Détentrice d’un bacc. en chimie et d’une maîtrise en sciences de l’éducation, section mesure et évaluation, Mme Richer a toujours oeuvré dans l’éducation au niveau collégial. Elle a d’abord enseigné pendant 8 ans la chimie au collège Edouard-Montpetit où elle est devenue conseillère en mesure et évaluation; puis, pendant trois ans, elle a occupé le poste de Directrice adjointe aux services pédagogiques du collège de Drummondville avant de devenir, en 1993, Directrice des études au collège de Saint-Hyacinthe.
Mme Richer aura à composer avec une équipe passablement renouvelée puisqu’en plus d’avoir à recruter un nouveau directeur des études en place de M. Jacques Hamel, le collège devra également nommer un nouveau secrétaire général puisque le titulaire actuel du poste M. Fernand Kemp prend sa retraite.
Louise Grégoire-Racicot, Journal de 2-Rives 
Pour diriger, il fallait d’abord m’entourer de collaborateurs qui ne me porteraient pas ombrage et qui seraient prêts à m’appuyer inconditionnellement dans les moments difficiles que je ne manquerais pas de traverser. La première occasion qui se présenta fut la sélection du Directeur des ressources humaines. Le titulaire de ce poste pendant de nombreuses années venait de prendre sa retraite. Il souhaitait être remplacé par le Syndicaliste, un ami du Littéraire, l’ex-président du syndicat des enseignants pendant plusieurs années avec lequel il  entretenait d’excellentes relations. Cette situation était délicate. Sans me faire d’illusion, pour bien paraître aux yeux du Directeur des ressources humaines qui venait de prendre sa retraite, je laissai la chance au coureur après avoir invité ouvertement le Syndicaliste à poser sa candidature en lui donnant l’accolade en face d’un restaurant, en présence de certains membres du comité des relations du travail (CRT) et de l’exécutif du syndicat des enseignants. J’ai un peu joué la comédie. Il le fallait à cause de l’ex-Directeur des ressources humaines. Cette mise en scène m’a été reprochée : je l’admets, elle était trompeuse. J’étais coincée. En effet, il était peu probable que je choisisse cet ancien président de syndicat comme directeur des ressources humaines et secrétaire général. Nous n’avions pas les mêmes idées ; il était certain qu’il ne partageait pas ce que mes adversaires appellent mon idéologie de droite. Et ils ajoutent pour me piquer et pour suggérer que je suis une dominatrice et une despote, qu’il n’avait pas la docilité requise.
Pendant le processus de sélection, le Syndicaliste se montra très indépendant d’esprit, arrogant et inutilement agressif à mon endroit. Par exemple, interrogé sur la manière dont il exercerait sa fonction tripartite de responsable des communications en plus de secrétaire général et de directeur des ressources humaines, il me répondit sèchement : C’est vous qui avez créé ce poste tripartite, c’est à vous de définir vos exigences, pas à moi. Ce n’est pas ici un jeu de devinettes. Questionné sur son curriculum vitae et les différentes étapes de sa carrière comme enseignant en sociologie, puis comme syndicaliste et pourquoi il aspirait au poste de directeur des ressources humaines, il répondit qu’il se croyait tout simplement compétent pour occuper le poste et, dans une attaque totalement inappropriée, il déclara : Moi, je n’ai jamais eu de plan de carrière.
Il m’accusait donc d’être une carriériste. Je me demande s’il voulait vraiment le poste. Ce n’était pas l’homme qu’il me fallait. Je ne l’ai pas trouvé très aimable. Quand je lui ai demandé si son passé de syndicaliste ne le mettait pas mal à l’aise pour devenir la partie patronale, il me répondit : Au contraire, le fait de connaître très bien la convention collective me permettra de l’appliquer avec équité. Je lui répliquai que sa réponse avait toutes les apparences d’un sophisme. Il me toisa très peu amicalement en disant : Sophisme ? je ne crois pas que vous ayez compris ce que j’ai voulu dire. La convention collective a été signée par les deux parties et peut être appliquée avec équité sans agressivité contre le syndicat.
Je dus me montrer habile pour neutraliser l’ex-directeur des ressources humaines en lui demandant de quitter le comité de sélection puisqu’il n’était pas neutre. On m’accusa ensuite de machiavélisme mais n’avais-je pas le droit de choisir la personne qui occuperait un poste aussi stratégique ! Le lendemain, quand j’ai annoncé par téléphone au Syndicaliste que sa candidature n’avait pas été retenue, je ne pus m’empêcher de lui rendre la monnaie de sa pièce en lui disant : Je vous ai traîné pendant tout le processus, ce qui laissait clairement entendre que je ne le trouvais pas compétent pour occuper le poste. Pour lui et ses amis et en particulier le Littéraire, c’était une insulte. Je l’ai faite pour leur montrer que je n’avais pas peur d’eux et que ce serait moi qui mènerait le collège, pas eux. D’autant plus qu’une autre candidature de Thetford Mines était meilleure. On m’a accusé d’avoir créé ce poste tripartite sur mesure pour elle sans tenir compte de mon objectif qui était de maximiser les ressources, objectif que j’allais appliquer par la suite à tous les cadres en leur confiant plusieurs responsabilités qui leur permettraient d’utiliser leur plein potentiel tout en sauvant des sous. Dans un petit collège qui doit se battre pour garder sa clientèle d'environ mille élèves, tout le monde doit mettre la main à la pâte et, à mon exemple, prendre les bouchées doubles.
Je vous ai traîné pendant tout le processus est apparu comme l’insulte gratuite d’une anti-syndicaliste qui veut écraser l’autre et l’humilier ; cela provoqua une colère noire chez les amis du vice-président de la Fédération autonome du collégial. Ce rejet de la candidature du Syndicaliste et surtout ma petite vacherie téléphonique me valut l’hostilité des amis de longue date du candidat malheureux en particulier deux membres du comité des relations du travail, le Politique et le Littéraire, qui allaient plus tard m’attaquer dans une lettre où ils firent un bilan négatif de l’An 1 de mon règne comme ils dirent. Ils prétendirent que la candidate de Thetford Mines était déjà choisie d’avance puisque, selon eux, le poste tripartite (responsable des communications, secrétaire général, directeur des ressources humaines) était taillé sur mesure pour elle ; on me reprocha aussi ce qu’on qualifia de manigances pour exclure l’ex-directeur des ressources humaines du comité de sélection qu’on appela, par dérision, un comité de sélection flottant ou pire, un comité de sélection bidon. On parla même, selon mes espions, de machiavélisme en jupon.
Toutes les consultations que je ferai plus tard seront qualifiées de bidon, à priori, puisqu’une despote (c’est ainsi qu’ils me voyaient) fait semblant de consulter car elle a tout décidé d’avance : elle n’a donc pas besoin de consulter. A ce moment-là, les consultations n’ont pour but que de préparer les employés à accepter la décision. J’aurais mauvaise grâce de contester cette analyse car elle est vraie. J’ai le malheur de savoir ce que je veux ; c’est ça pour moi avoir du leadership. Si j’étais un homme ça passerait mieux ; comme chantait Dalida à qui je ressemble un peu physiquement : mais moi, je ne suis qu’une femme. Dans une entrevue à la revue Actualité, Pierre Péladeau a dit que les femmes utilisaient leurs charmes en affaires ce qui énerva les féministes de l’Université de Montréal comme Gloria Escomel et Lysiane Gagnon qui s’opposèrent à ce que l’homme d’affaires reçoive un doctorat honorifique surtout, dirent-elles, au lendemain du drame de Polytechnique.
Cette référence à Polytechnique enragea le Littéraire. Dans une lettre au Devoir, il défendit Pierre Péladeau et dénonça ce qu’il appelait le terrorisme rose. Je l’admets, il m’arrive d’essayer de séduire pour arriver à mes fins mais toujours d’une façon platonique malgré ce que disent certaines langues sales qui ont beaucoup d’imagination. Il est vrai qu’on ne prête qu’aux riches. Quand on a des atouts dans son jeu, pourquoi ne pas s’en servir !
Après ce premier accrochage à l’occasion de la sélection de la Directrice des ressources humaines, une étudiante adulte encouragée dans sa démarche par son enseignante (Francine B.) devenue professionnelle à l'Education des adultes porta plainte contre le Littéraire, l’enseignant qui répandait ces calomnies sur mon soi-disant despotisme, un professeur de français membre du comité des relations du travail (CRT) dont il sera beaucoup question dans les lignes qui vont suivre car il savait comment s’y prendre pour contrecarrer mes projets et pour me contrarier. L’Adjointe au directeur des études Louise K. m’avait souvent parlé de cet enseignant controversé, auteur de livres et d’articles contre les libéraux, une sorte de Don Quichotte chevauchant la rossinante de l'éthique politique pour attaquer les moulins à vent de la corruption des adversaires de l’indépendance du Québec.
Pendant la Commission Gomery, il a dû avoir bien des satisfactions comme quand il a lu les deux livres de Jean-François Lisée sur Robert Bourassa. Selon l’Adjointe et d’autres sources libérales, il utilisait ses cours, quand il daignait en donner car il déteste les cours magistraux, à des fins politiques par le choix des oeuvres ou par des commentaires souvent virulents contre les fédéralistes au pouvoir à Québec comme à Ottawa. Il est même passé à la télévision à l’émission Femmes d’aujourd’hui. Interrogé par  la journaliste Jeanne Sauvé qui allait devenir Gouverneure générale du Canada et qui essayait de lui faire dire qu’il utilisait le Cassé de Jacques Renaud à des fins politiques, il répondit qu’il conduisait ses élèves au seuil de la politique et que ce n’était pas de sa faute si le problème de la langue au Québec était un problème politique. Quand je pense que le curé de la plus grosse paroisse de Sorel l’a attaqué dans son sermon du dimanche, je me dis qu’il a le don de réveiller les passions, de susciter la controverse et de semer la zizanie. Il déteste les libéraux qu’il appelle des parvenus. et des satisfaits du statu quo. Donc il me déteste et il n’aime pas le plus gros agent d’assurances de la région qui a été son élève et avec lequel il a eu des frictions.
Il utilisait parfois ses propres textes en classe comme son analyse de Menaud maître draveur publiée dans son troisième livre et ne donnait pas vraiment de cours car il prétendait que les cours magistraux étaient bons pour l’ego du professeur mais pas nécessairement formateurs pour les élèves. La division des cours de français en deux heures de travaux pratiques et deux heures d’enseignement par semaine semblait lui donner raison. Lui, il appliquait plutôt la division trois heures de travaux pratiques-une heure d'enseignement et encore! Il aimait citer le titre d’un livre d’un collègue: Moi, j’enseigne mais eux apprennent-ils?
Auteur d’une thèse de doctorat sur l’espace autobiographique de la fiction défendue avec succès à l’Université Laval en 1987, il racontait en classe avec humour des histoires puisées dans sa vie privée où les élèves ne savaient plus si sa femme, par exemple, était une personne réelle ou un personnage fictif. D’ailleurs, après avoir raconté une anecdote illustrant ses rapports (non intimes) avec sa femme, il demandait à ses élèves quelles paroles rapportées étaient réelles et quelles paroles étaient inventées tout en faisant remarquer que la partie inventée était plus vraie que la partie dite réelle. Il parlait de l’actualité sportive ou politique et critiquait mon administration puis, sans transition, il faisait un portrait de Célimène ( à qui il lui arrivait de me comparer, ce qui est flatteur pour moi), personnage du Misanthrope, en posant la question : Célimène est-elle hypocrite ou stratégique ? en faisant réfléchir sur la situation de la femme au 17è siècle. Il raconta la visite de la Commission d’évaluation de l’enseignement collégial où il s’était montré tellement désagréable  que la Commissaire principale, après la réunion, dans mon bureau, me demanda : Qui est ce grossier personnage ? Il nous a fait honte et il l’a fait exprès. 
Il reprocha à un collègue professeur de philosophie disciple d'Urantia son obséquiosité devant l’imposante (physiquement) commissaire, ancienne directrice des études du collège de Ste-Foy. Amicalement, car il savait que son confrère pensait comme lui sur la Commission, il lui dit : Tu es un bel hypocrite ! et celui-ci lui répondit : Hypocrite, non. Stratégique, oui.  Il utilisait cette anecdote pour expliquer qu’il faut faire attention avant d’accuser la coquette et séduisante Célimène d’hypocrisie, elle qui avait quatre amants (sans relations sexuelles...) qu’elle encourageait en même temps. Il est un peu obsédé par l’hypocrisie car il prétend qu’il y en a beaucoup dans notre collège et, singulièrement, dans son département. Selon des témoignages nombreux et convergents, il se donnait parfois des allures d’humoriste à la Yvon Deschamps ou à la Woody Allen qu’il admirait pour mieux faire passer ses idées. Aux yeux de nombreux élèves superficiels, il passait pour un comique et même, disaient certains élèves, cet âge est sans pitié, pour un bouffon. Il marchait souvent sur un fil comme un funambule. Il mettait de la bonne humeur et de la détente dans son enseignement et montrait du plaisir à expliquer avec aisance et décontraction des oeuvres littéraires complexes. Il se vantait de faire comprendre et même aimer le roman difficile de Madame De Lafayette, La princesse de Clèves à l’aide de dix questions précises sur chacun des quatre chapitres du roman. Cette recherche donnait de si bons résultats que ses élèves en culottes courtes en discutaient entre eux pendant les exercices d'éducation physique. Il est vrai que la question de la durée en amour touche des jeunes de dix-sept-dix-huit ans et que le refus de la princesse de Clèves des avances du duc de Nemours qui était une sorte de Don Juan alimentait les conversations. 
On m’a raconté qu’au début d’une session, un matin de bonne heure alors que ses élèves étaient à moitié endormis, il essaya de les réveiller en faisant de l’humour et comme ça ne marchait pas, il leur dit après s’être plaint qu’il les trouvait difficiles (surtout les Sorelois…) et qu’il n’était pas facile de les faire rire : Je n'ai pas le talent de Gilles Latulipe. Excusez-moi, je fais de l’esprit de bottine. Un de ses élèves répliqua : Continuez, monsieur, c’est très délassant ; il lui donna la main en demandant son nom à cet élève qui devint instantanément son ami.
Comme vous voyez, je m’intéresse beaucoup à lui. J’essaie de savoir ce qu’il dit en classe car il m’attaque souvent. Je reçois des téléphones de parents qui se plaignent que le professeur de français de leur fille ou de leur fils est un agitateur qui ne cesse de critiquer et prend un malin plaisir à déstabiliser ses élèves qui sont là pour étudier et non pour se faire manipuler par un enseignant qui abuse de la tribune que lui procure sa fonction et dont le totem est le renard. Son plus grand plaisir, dit-il en anglais dans un cours de français, c’est to outfox la Direction, ce qu’il est impossible de traduire tout comme le mot timing.
Etre plus renard que la renarde, serait ma traduction. Et il parlait des trois renards nourris aux croustilles qu’il avait vus au club de golf de Rosemère ou du renard aperçu au club de golf de Blainville qui courait le long du bois poursuivi par des corbeaux qui croassaient. Comme dans la fable de La Fontaine. Le Littéraire est un personnage au moins aussi dangereux que le Syndicaliste, le candidat au poste de directeur des ressources humaines que j’ai eu raison de rejeter. Il faudrait absolument trouver un moyen de les neutraliser. Lors de la première rencontre que j’ai eue avec lui pour discuter de la plainte de l’élève-adulte, je me sentais comme le directeur de la prison d’Alcatraz devant le dossier de Clint Eastwood : QI au-dessus de la moyenne : à mater. Tâche qui devait s’avérer impossible, je l'avoue candidement.
Pour savoir à qui j’aurais éventuellement affaire et pour établir un rapport de forces, j’ai attaqué la première car je savais que mon rejet du Syndicaliste l’avait grandement contrarié et allait avoir des conséquences. J’ai d’abord demandé à rencontrer le président du syndicat dit l’Ebéniste et professeur de biologie depuis vingt ans. Le prétexte : la plainte contre le Littéraire d’une étudiante adulte encouragée par une enseignante qu’il avait remplacée pendant trois semaines à propos de cours donnés trois mois plus tôt avant les vacances d'été. J’attaquai directement l’enseignant visé à partir du contenu de la plainte et des critiques que j’avais entendues contre lui à travers les ans. J’allais à la pêche (jeu dangereux) pour voir quelle serait la réaction du président du syndicat. Or, l’Ebéniste se montra totalement solidaire de son collègue ajoutant même qu’il avait de l’admiration pour lui et qu’il aurait souhaité que ses trois enfants (soit dit en passant, inscrits dans un autre collège à Drummondville) aient un tel professeur de français cultivé qui donne le goût de lire et fait aimer la littérature. En un mot, c’était des amis depuis des années. J’ai fait une erreur en le convoquant ; il aurait été plus correct d’en parler directement à l’intéressé. Question d’éthique professionnelle. Mauvais départ signe d'inimitié contraire aux lois de l'hospitalité. 
Devant la tournure des événements, j’essayai de faire croire que cette conversation à bâtons rompus avec le président du syndicat n’avait pas plus d’importance que cela et ne devait pas avoir de suites. Je voulais donc en rester là, quand je reçus un téléphone du Littéraire qui exigeait une rencontre pour discuter de cette plainte dont il connaissait l’origine même si je lui ai dit que ce n’était pas nécessaire puisque la discussion avec le président du syndicat m’avait rassurée. Il insista. Lui, il n’était pas du tout rassuré. Il tenait à donner son point de vue contre les attaques dont il avait été l’objet et il souhaitait me donner des renseignements qui pourraient corriger l’opinion que je semblais me faire de lui pour que nos relations partent sur un meilleur pied. Il était de très mauvaise humeur et, selon un de mes espions, il aurait dit que je ne ferais pas avec lui ce que j’avais fait avec son ami le Syndicaliste rejeté et bafoué. Je l’ai mis sur la défensive et je suis sûre qu’il se prépare à contre-attaquer. J’aurais dû me souvenir du proverbe haïtien : Avant de traverser la rivière, il ne faut pas insulter le caïman. Mais en prenant l’initiative, je voulais un affrontement où j’aurais le dessus. Comme vous savez, une plainte contre un enseignant, ça le déstabilise et ça place l’administrateur dans une position de force. Au minimum, l’enseignant doit s’expliquer, se défendre et se justifier. Et en attendant la rencontre, il se fait du mauvais sang.
Cette rencontre a eu lieu, je l’ai eu l’affrontement que j’anticipais mais je ne crois pas avoir eu le dessus. Ce fut une heure mouvementée pleine d’escarmouches. Il s'était bien préparé. Par l’indépendance et le caractère, Le Littéraire ressemble au Syndicaliste. C’est facile de comprendre pourquoi ils sont des amis. C’est évident que ces gens-là me prennent pour une arriviste et n’ont pas beaucoup de respect et d’estime pour moi. Pourtant, ils ne me connaissent pas. Comme militant  du Parti québécois, le Littéraire a déjà travaillé avec des hommes d’envergure comme René Lévesque, Jacques Parizeau et Camille Laurin alors qui suis-je, moi, pour venir lui faire la leçon ? Je ne l’impressionne pas. Il tenait à ce que je le sache. C’est un homme fier. Et en plus, je viens d’arriver au collège en 1997 tandis que lui, il est là depuis 1969. Il tenait à ce que je comprenne, et vite à part ça, que je ne viendrais pas faire la loi ici à son détriment. Quand je lui ai dit qu’il se servait de ses livres dans ses cours, il m’a plantée car cette critique était une vieille histoire et ne pouvait venir de la plainte de l’étudiante adulte puisqu’il avait étudié Les Femmes savantes de Molière pendant trois semaines au printemps 1997 en remplacement d’une enseignante en congé de maladie qui m’a décrit son comportement désinvolte.
Par exemple, le Littéraire a pris la feuille décrivant les quarante critères de correction de l’analyse littéraire utilisés par l’enseignante (son ancienne élève...)  et, théâtralement, l’a jetée dans la poubelle en disant : Je ne suis pas un ordinateur ! C’était un manque de respect pour sa collègue qui était une de ses anciennes élèves. Certaines élèves ont été choquées dont l’adulte grassouillette dans la quarantaine qui a porté plainte. Il me dit : De plus, avec la réforme de l’enseignement du français, depuis cinq ans, j’étudie surtout des auteurs français, François Villon, Montaigne, Mme de La Fayette, Molière et je me sers de textes québécois comme un extrait de Marie-Didace, la dernière confession du Père Didace de Germaine Guèvremont ou le Testament de De Lorimier publié dans les Ecrits de prison qui est un chef-d’oeuvre de la littérature universelle, pour donner des exemples d’analyse littéraire. Je n’étudie plus Menaud, maître-draveur, de Mgr Félix-antoine Savard, ce monument d’impuissance.
Il n’eut pas beaucoup de peine à prouver que mon opinion sur lui provenait de ce qu’il a appelé, avec un violent mépris, les mémérages de la clique libérale qui parlent dans mon dos depuis plus de vingt-cinq ans et qui se vengent des livres que j’ai écrits contre eux en essayant de nuire à ma réputation comme enseignant. Alors là, ce fut l’affrontement qui a atteint un sommet quand je lui ai rapporté, par provocation, pour lui passer un message et le déstabiliser, que l’étudiante adulte qui avait porté plainte contre lui l’avait trouvé vulgaire parce que, entre autres, il avait sacré en classe en disant : Réveille, ciboire ! à un élève qui s’était endormi sur son bureau au lieu d’écouter un enregistrement des Femmes savantes de Molière.
Comme j’avais répété cette accusation devant le président du syndicat, sa réponse était préparée et elle fut spectaculaire. Il voulut savoir quelle était ma conception de la vulgarité. Il me cita une phrase de Montaigne en me demandant si le mot cul était vulgaire : Plus le singe monte haut dans l’arbre, plus il montre son cul. Est-ce que c'est vulgaire? Non, lui répondis-je, ce n’est pas vulgaire. Il me dit : Est-ce que c’est parce que c’est Montaigne qui utilise le mot cul? Vous voilà prise en flagrant délit de snobisme ! Et il ajouta, cinglant : Soit dit en passant, directrice générale, ce n’est pas très haut dans l’arbre ! On m’avait averti que son arrogance n’avait pas de limites et on avait raison. Je l’ai vu en direct. Quant à y être, pour rester dans cette région du corps qui semble l’intéresser, il aurait pu me citer la fin des Essais où Montaigne écrit : Au plus haut trône du monde, on est toujours assis que sur son cul. Et il aurait pu ajouter : Directrice générale, ce n’est pas un très haut trône. C’est certain que ce fin lettré comme l'appelle avec ironie le Directeur des études me servira cette citation un jour ou l’autre puisqu’il m’appelle la Reine…et la répétera à quiconque veut l'entendre dans les corridors ou à la cafétéria où je suis constamment l'objet de ses attaques qui tentent de me ridiculiser.
J’encaissai l’insolence comme si de rien n’était en prenant une grande respiration et en me croisant la jambe et il en profita, ô divine surprise, pour me dire que j’avais de belles jambes tout en atténuant cette remarque inattendue et totalement inappropriée en me demandant, pour faire diversion, s’il y avait un micro sous la table, réflexe normal du spécialiste de l’affaire du Watergate qu’il se disait être. J’ai entendu dire que dans le récit qu’il faisait de cette rencontre, au moment du commentaire admiratif et justifié sur mes belles jambes, ses amis n’en croyaient pas leurs oreilles et lui dirent, mi-sérieux, mi-taquins, que j’aurais pu l’accuser de harcèlement sexuel. Voyons donc ! Ces misogynes s’imaginent que je ne sais pas faire la différence entre une innocente gaminerie et du harcèlement. Au contraire, j’avouerai qu’au milieu de cet affrontement, ce cri d’admiration spontané, involontaire et viril qui exprimait sans doute un désir inconscient, toucha la femme consciente de ses charmes que je suis et que je serai toujours. Ce n’est pas la seule fois que son inconscient  échappe à son contrôle comme nous le verrons plus tard quand il a dit: vous étiez à jeun! en plein conseil d'administration devant trente personnes.
Pour le troubler encore plus et le faire rêver, je lui ai dit que j’étais une amoureuse. Il en fut bouche bée. La conversation prenait cette tournure ambiguë qui fait tout l’intérêt des relations homme-femme. Comme il soulignait mon côté glamour, il fit un jeu de mots en me disant que j’étais une glamoureuse. Je savourai l’instant créateur. Mon interlocuteur émoustillé s’enflammait. Je ne savais pas comment il retomberait sur ses pieds. Ma froideur y contribua. Excusez l’anti-climax, je dois dire qu’il n’est pas du tout mon genre. Il manque singulièrement d'élégance.  Il a beau avoir lu les Essais de Montaigne, je préfère le charme viril du séduisant Jean B., Directeur de l'International et des ressources matérielles aux cheveux noirs pommadés qui est un bel étalon et un administrateur de haut niveau qui ira loin.
Cet enseignant qui allait devenir mon plus implacable ennemi était habitué à la polysémie du langage et pouvait jouer sur plusieurs niveaux de sens, ce qui faisait que dans ses cours, on ne s’ennuyait pas. Je lui renvoyai habilement le compliment sur mes belles jambes en disant qu’il était un homme cultivé et  brillant, ce qui ne sembla pas le toucher puisqu’il me mit en garde d’une manière surprenante. Il me dit : Faites attention, j’ai l’air de rien comme ça avec mes petites insolences calculées et mes citations de Montaigne, mais je suis un tueur ! Il a bien dit : Je suis un tueur. Les mots ont dû dépasser sa pensée.  Ce ne serait pas la première fois que ça lui arrive. Je n’en croyais pas mes oreilles : des menaces ! On était loin de mes belles jambes et de mon parfum délicat. D’origine italienne, sa grand-mère est sicilienne et son grand-père piémontais ; a-t-il du sang de la mafia dans les veines ? S’il pense m’intimider, il est mieux de se lever de bonne heure. Comme me l’a raconté l’Adjointe Louise K., à moins qu’il ne sorte de nouveau son petit canif suisse (symbole phallique dérisoire) comme il l’avait fait devant la responsable anglophone de la condition féminine de la Fédération syndicale, (qui se porta à la défense des employées unilingues de Eaton qualifiées grossièrement par un ministre libéral de grosses maudites anglaises et qui avait le physique de l’emploi), cette anglophone de Dawson, dis-je, qui tomba dans son piège et se ridiculisa en l’accusant de l’avoir menacée au couteau comme si on était dans le Bronx.  C'était pendant une réunion et devant cinquante personnes qui ont bien ri de l'anecdote. Dans une discussion avec Greta Nemiroff du collège de Dawson, il sortit son petit canif, l'ouvrit et le lui offrit en lui disant: Si tu te sens attaquée, défends-toi!
Le plus drôle, c’est que les chefs mâles de la Fédération ont cru la féministe ou ont agi comme s’ils la croyaient. Ils ont écrit une lettre de réprimandes au syndicat local et, lors d’une rencontre à l’Aquarelle, un des meilleurs restaurants de la région, le Politique a dit brutalement à un leader national : Votre lettre, vous pouvez vous la mettre là où je pense ! Tanné d’entendre les jérémiades féministes peu justifiées en contexte collégial, le Littéraire avait apostrophé la féministe en chef de la Fédération (la FAC) en lui présentant par le bout de la lame un petit canif ouvert et en lui disant : Si tu te sens attaquée, défends-toi. En colère devant la tentative de la ridiculiser, la féministe avait essayé de transformer cette pantomime de théâtre de boulevard à la Labiche en attaque au couteau shakespearienne comme dans les rues de New York. Et s’était rendue encore plus ridicule, ce qui était le but du Littéraire qui a quand même été obligé d’aller s’expliquer devant l’exécutif du collège anglophone de Montréal situé sur la rue Sherbrooke non loin du Forum où les Canadiens de Montréal ont gagné plus de vingt coupes Stanley.  Les féministes ne verront jamais le Littéraire faire des crises de nerfs et de tremblements en disant My nerves comme la mère de Lizzy dans Pride and Prejudice de Jane Austen. Lors de cette assemblée syndicale, l'énorme Greta Nemiroff, plantureuse et décolletée, assise dans un fauteuil, demanda au Littéraire la traduction du mot plot. Comme il était debout et avait une vue en plongée sur la spectaculaire poitrine de Greta, il rougit et ne répondit pas voyant la manoeuvre. Il fut l'objet par la suite de bien des taquineries par ses amis témoins de la scène et qui l'avaient vu rougir.
Cette première rencontre d'une heure ressemblait à une partie de ping-pong, ce  qui est de mauvais augure. Blessé dans sa fierté, cet enseignant sera sans doute un de mes critiques les plus sévères. Après cet affrontement et après le rejet de la candidature de son ami, je suis certaine que je ne pourrai pas canaliser leurs énergies dans le bon sens ; je ne pourrai pas compter sur l’appui de ces syndicalistes dans la réalisation de mes projets qui demandent des efforts de tous. Au fond, je peux bien l’admettre : j’ai été maladroite. Ce sont des contestataires-nés qui me mettront des bâtons dans les roues. De toutes façons, je le savais puisque depuis plusieurs années, je m’intéresse au collège ; je sais qui sont les leaders. J'ai eu certainement tort de les prendre de front. Je me suis crue la plus forte. Ce fut une erreur qui devait s'avérer fatale.

Sauf que là, je ne suis plus dans mon salon sur le bord du fleuve avec mes amis libéraux, un bon verre de vin à la main. Je suis directrice générale du collège. Je suis dans l’action et, eux, ils sont dans l’opposition. La partie sera rude. C’est difficile de bien administrer une institution et de réaliser des projets quand les leaders d’opinion te sont hostiles. Je suis une passionnée mais, en revanche, je crois que ne suis pas une grande stratège. Je suis peut-être un peu trop émotive bien que je me serve parfois de mon apparente émotivité à des fins stratégiques. Il m’arrive de jouer les femmes troublées et faibles pour réveiller le mâle chevalier qui sommeille chez tous les cadres masculins et les membres du Conseil d’administration qui m’entourent et qu’il n’est pas bien difficile de réveiller. Ça prend à tout coup. Pauvres hommes ! J’ai voulu dominer deux leaders syndicaux dès mon arrivée au collège : j’allais en payer le prix. Dès ce moment, leur est venue l'idée de citer Montaigne qui a écrit:  Donnons à l’ordre politique de les souffrir patiemment indignes. 
Dès mon arrivée au pouvoir, il a fallu s’attaquer à l’organigramme en rationalisant les ressources humaines : il y a trop de membres du personnel de soutien qui ne donnent pas leur plein rendement. C’est difficile et le syndicat m’accuse publiquement déjà de traiter les employés comme des pions que je déplace selon mes caprices ou pour montrer qui est le boss. Rien de plus faux. J’ai fait le ménage avec l’appui de certains membres du personnel de soutien qui eux, comme le dit le responsable de l’imprimerie, travaillent au lieu de se pogner le cul une grande partie de la journée
Je m’excuse de reproduire ce langage vulgaire, mais si je le fais, c’est parce qu’il est tellement criant de vérité. Lors de l’accueil du personnel, le président du syndicat du soutien a lu devant tout le monde une lettre de protestation qui a gâché la rentrée de l’automne de ma deuxième année.  Les professeurs ont applaudi. 

La Sentinelle, bulletin d’information syndicale des enseignants, essaie de faire de la satire sur mon dos. Ils me reprochent de faire de la comptabilité créative avec l’International et de préférer les rénovations dans les bureaux de l’administration au bien-être du personnel. Lors de l’accueil du personnel, nous avons passé un message. J'ai dit substantiellement ceci:  c’est le gouvernement Bouchard qui m’oblige à administrer serré ; je travaille soixante heures par semaine, alors arrêtez de vous plaindre que votre tâche est trop lourde. Le Syndicat des enseignants est en désaccord. Selon lui, le gouvernement sait que nous avons 2.4 $ millions de surplus.  Je ferais de la petite politique libérale et je serais démagogue. Sans demander l’avis de personne, j’ai mis la hache dans le système audiovisuel en démantelant un appareillage permettant de projeter des films dans chaque classe à partir d’une centrale qui était peu utilisée par les enseignants ; j’ai voulu envoyer le container en Afrique mais une guerre civile en Côte d’Ivoire m’en a empêché. C’est très difficile de rentabiliser l’International mais au moins, cela m’aura donné l’occasion de faire de beaux voyages toutes dépenses payées. Cela fait des envieux.  La la lère comme dirait Foglia. Je suis allée en Afrique du Nord par affaires et j’en ai profité pour prendre des vacances en France. N’est-il pas normal que la haute fonction que j’occupe soit accompagnée de certains avantages comme les ministres qui ont leur chauffeur, leur limousine et leur compte de dépenses pour les repas  et le logement.
J’ai eu la bonne idée d’inviter l’exécutif du syndicat des enseignants (dont ne font pas partie en ce moment le Politique et le Littéraire) au restaurant pour discuter de mon projet de développement des programmes en assurances, en électrotechnique et en réseautique et mon projet de financement du Centre de transfert des technologies qui n’est pas encore reconnu officiellement et pas encore financé par le Ministère. Les quatre membres de l’exécutif se sont montrés très réceptifs et m’ont accordé 4.2 ETC (équivalent temps complet) pris dans les ressources à l'enseignement comme contribution à la réalisation de ces projets. C’est 5% des ressources réservées à l’enseignement qui ne seront plus consacrées à l'enseignement. C’est énorme, je l'admets. Enfin, des gens qui me comprennent et qui acceptent de faire leur part dans le développement du collège, me suis-je dit.  Je me félicite d’avoir réussi à les convaincre de faire passer l'intérêt général avant leur intérêt particulier. Parlant de projets, chacun des trois membres de l’exécutif syndical avait un intérêt personnel à ce que des ressources soient allouées pour la réalisation de projets, l’un d’entre eux n’ayant même pas une tâche complète. Plus tard, mes ennemis ont dit que j’ai essayé de les corrompre. Disons simplement que je leur ai fait une offre qu’ils ne pouvaient refuser. Le vice-président est un grand ami de l’Adjointe au directeur des études ; c’est le premier qui a prédit que je serais nommée directrice générale. Il ne se présentera pas aux prochaines élections à l’exécutif du syndicat : c’est dommage. Je me suis montrée très persuasive et j’ai payé l’addition. Le Politique et le Littéraire, au CRT, plus tard, ont fait renverser cette contribution du syndicat en disant que c'était contraire à la convention collective, que c’était illégal d’enlever 4.2 professeurs à l’enseignement. Ils ont obtenu gain de cause. Ils ont annulé mes efforts de  séduction.
J’ai invité deux haut fonctionnaires de Québec comme conférenciers pour sensibiliser tout le personnel aux contraintes budgétaires auxquelles nous devons faire face. Peine perdue, le syndicat des enseignants revient sur le surplus de 2,4 $ millions. Ils ont montré leur force en contestant ouvertement notre projet de leur faire financer en partie les nouvelles voies de sortie. Ils ont convoqué une assemblée syndicale en même temps que la réunion du Conseil d’administration et les enseignants, nombreux, ont envahi la salle de réunion ce qui nous a obligés à déménager à l’auditorium. Ils me donnent beaucoup de fil à retordre. Je ne suis pas au bout de mes peines. Ces enseignants nous accusent de vouloir diminuer les ressources allouées à l’enseignement et donc de vouloir augmenter leur tâche et cela au profit de projets qu’ils qualifient péjorativement de périphériques comme le Centre de transfert des technologies qui n’est pas encore subventionné par le Ministère ou comme l’International. En particulier, l’International est l’objet privilégié de leurs attaques sous l’impulsion du coordonnateur du département d’Informatique Jean-Michel Leclaire qui est très coriace et qui augmente substantiellement ses revenus en donnant des stages d’été en informatique. S’il continue à m’enquiquiner, je vais charger le Directeur des ressources matérielles d’une mission : lui couper ses stages d’été. Ils craignent un déficit dans le domaine de l’International et nous envient de faire des voyages avec des comptes de dépenses qu’ils qualifient d’illimités ; ils les qualifient avec mépris de voyages de prestige, sous-entendu, coûteux et inutiles. Ils sont vraiment nés pour un petit pain.
Autre dossier. Je n’ai pas réussi à imposer mon choix au poste de Directrice des études. Je voulais nommer Louise Khelfa à l’interne car je la juge compétente, sans passer par un comité de sélection mais l’opposition de mes adversaires, le Syndicaliste en tête, réussit à créer un tel malaise que j’ai été obligée de reculer. Louise a cru être brûlée et ne s’est malheureusement pas présentée au comité de sélection qui a choisi un professeur de philosophie d’un autre collège comme directeur des études. Je me suis arrangée pour que son mandat finisse avant le mien... pour pouvoir mieux le contrôler. Louise K. avait toutes les qualités pour être une excellente directrice des études. Elle aurait dû présenter sa candidature. Les gestes d’hostilité qu’elle avait posés contre le Littéraire en l’espionnant l’ont portée à penser que la campagne contre sa nomination sans passer par un comité de sélection était dirigée contre sa propre personne. Comme me l’ont rapporté mes espions, justice immanente a dit triomphalement le Littéraire.  
Ayant reçu le mandat du Conseil d’administration de revoir tous les contrats signés par le collège pour obtenir des services (entretien, conciergerie, cafétéria), j’ai entrepris des négociations avec l’aide du Directeur des ressources matérielles. Je me devais d’augmenter les revenus provenant de la cafétéria. Il s’en est suivi une lutte épique. Nous nous sommes emparés des revenus provenant des machines à boisson. Puis, nous avons augmenté le loyer à 18,500 $ en menaçant de confier la cafétéria à l’entreprise privée. Ce n’était pas qu’une menace : je voulais vraiment confier la cafétéria à une entreprise privée. Paraît-il que ça fait partie de mon idéologie de droite. Comme moyen de pression, le Café du Bourg cessa d’offrir les services du Café-In qui est très apprécié par tout le personnel. Le conflit culmina dans un faux débat devant tout le personnel précédé de la publication d’une analyse du syndicat des enseignants qui tentait de ridiculiser le fonctionnement du Conseil d’administration sous ma direction.
Le Comité de direction intercepta ce Complément à l’Info-CA ce qui nous valut un grief que nous allions perdre sur l’utilisation des casiers des enseignants pour transmettre de l’information syndicale. Comme pour les frais de stationnement et les frais d’utilisation des ordinateurs, le dossier de la cafétéria donna l’occasion de se faire valoir aux mêmes opposants systématiques à toutes mes propositions pour assainir les finances du Collège. Cela en devient exaspérant. Le Conseil d’administration a beau m’appuyer, les attitudes négatives à mon endroit, au jour le jour, minent mes énergies. Mes adversaires sont habiles, tenaces et savent utiliser les médias, ce qu’ils ont appris à faire comme chroniqueurs dans des journaux ou comme militants politiques responsables de l’information. Leur mauvaise foi dépasse parfois les bornes comme quand on m’a accusée de mépriser les sept employées de la cafétéria parce que  je les ai appelées affectueusement "les petites madames". On m’accuse de menacer leurs emplois en voulant privatiser la cafétéria. Par ailleurs, la porte-parole de l’association étudiante qui est aussi membre de l’exécutif du Collège m’a déçue. Lorraine Bourret m’attaque dans le journal local sur la question des frais d’utilisation des ordinateurs par les élèves et, en général, sur mon peu de sens démocratique. Je serais une grande manipulatrice.  Le représentant des professionnels au Conseil d’administration l’a qualifiée de traître dans le journal local tiré à plus de 25,000 exemplaires et distribué gratuitement dans toute la région. Ce journal ne manque pas une occasion de donner la parole à mes adversaires comme s’ils étaient aussi importants que moi. Pourtant, moi, je suis une leader qui joue un rôle majeur dans la région comme présidente du Centre local de développement (CLD) et comme Directrice générale du collège. J’en ai fait le reproche personnellement à la rédactrice en chef qui m’a répondu que son journal essayait de faire du bon journalisme honnête et consciencieux. Elle semblait se réjouir de ma colère: je lui ai rappelé que le Collège paie des pleines pages de publicité dans son journal. Je suis allé me plaindre au directeur du journal. En vain. Pierre Plante est plus coriace que je ne croyais: il a pris la défense de sa journaliste et défendu âprement la liberté de son journal.
Le Littéraire et le Politique, membres du Comité des relations du travail (CRT) qui ne font pas actuellement partie de l’exécutif du syndicat ont saboté les résultats de ma rencontre avec l’exécutif du syndicat des enseignants en soutenant que les concessions obtenues étaient illégales, contraires à la convention collective et constituaient un détournement de ressources. On suggère que j’ai acheté l’exécutif en payant l’addition de ce repas bien arrosé et que j’ai tenté de les corrompre. Ce qui implique un jugement de valeur contre l’exécutif du syndicat qui aurait montré sa faiblesse en acceptant de céder 4.2 ETC (Equivalent temps complet) pour des projets périphériques dont certains auraient pu les intéresser personnellement. Je serais une séductrice.  Paraît-il que je leur rappelle un roman de Guy des Cars intitulé la corruptrice. Je n'ai pas de temps à perdre et je ne lirai pas ce roman de Guy des Cars. Je ne sais trop quoi faire pour arrêter ces injures qui se répandent dans le collège. Pendant les réunions du Comité des relations du travail, la Directrice des ressources humaines est incapable de leur tenir tête : ils sont trop revendicateurs et connaissent trop bien la convention collective ayant déjà gagné des griefs ce qui les a rendus arrogants. Il faudra que je trouve un moyen de leur rabaisser le caquet.
Tout le monde collabore à la relance du collège, mais pas eux. J’ai multiplié les activités sociales pour créer un climat favorable et mis sur pied une Fondation qui ramasse des fonds à un bon rythme. Mon objectif est d’atteindre le demi-million de dollars pour pouvoir financer certains projets et surtout pour donner des bourses aux élèves pour les attirer vers le collège et les encourager dans leurs études. Mais le Littéraire et le Politique, eux, sont petits et pensent petit : ils n’ont pas de vision de l’avenir du collège. Ils habitent la région de Montréal. Ils ne semblent pas conscients que des familles à l’aise financièrement se demandent s’ils ne feraient pas mieux d’envoyer leurs enfants étudier dans un autre collège que le nôtre. Le fait qu’ils n’habitent pas dans la région soreloise explique bien des choses. Ils ne sont pas intégrés à la vie sociale de la région et ça paraît. Il y a une sensibilité qui leur manque ; ils n’ont pas l’air de comprendre l’importance des activités sociales que j’organise. La preuve qu’ils ne comprennent rien : dans mon dos, ils me traitent de grande mondaine bourgeoise. Nous ne sommes définitivement pas sur la même longueur d’ondes.
Ces considérations s’appliquent particulièrement à l’un d’entre eux et je n’ai pas besoin de le nommer. Comme représentant des enseignants au Conseil d’administration, le Littéraire est sur le Comité d’évaluation du Directeur des études et de la Directrice générale. Mais il n’est pas question qu’il m’évalue.  Je n’accepterai jamais d’être évaluée par lui. Il me déteste. A ses yeux, je ne fais jamais rien de bon. L’occasion m’a été fournie de le chasser du comité d’évaluation quand, avec un collègue du CRT, le Politique, il a envoyé au président du Conseil d’administration une lettre qui fait un bilan très négatif de l’An 1 où il me menace en prévoyant que l’An 2 se déroulera sous les auspices du dieu de la guerre Mars et non de la déesse de l’amour Vénus. Ils attaquent aussi le représentant des professionnels qu’ils accusent d’obséquiosité, de complaisance et même de soumission servile. Il est vrai que ce professionnel a des ambitions.
Un millionnaire que je me vante d’avoir pour ami, le plus important agent d’assurances de la région qui pourrait être député libéral s’il le voulait et même ministre car il en a l’envergure, m’a fait plaisir en déchirant ostensiblement ce torchon de bilan écrit par le Politique et le LIttéraire  en plein Conseil d’administration en l’absence des auteurs de la lettre.  En réplique à cette lettre qui m’accuse d’avoir fait une entourloupette sur le financement des quatre nouvelles voies de sortie et qui prétend que j'exige de mes subalternes de la servilité, j’ai contre-attaqué par une mesure disciplinaire : il y aura une lettre de doléances versée au dossier pour chacun des deux enseignants et une suspension de six mois du Conseil d’administration pour Boutefeu.  Je ne laisse plus rien passer après la publication d’un organe syndical, la Sentinelle, qui a tenté de me ridiculiser. Je vais apprendre à ces employés qu’ils ont une obligation de loyauté envers leur employeur. Avec ma directrice des ressources humaines qui est avocate, j’ai commencé à étudier à fond le chapitre sur les mesures disciplinaires dans la convention collective des enseignants. Nous avons un dossier  sur le Littéraire : il aime jouer à la victime de harcèlement mais, à travers les années, l’administration a fait preuve à son endroit d’une tolérance que je juge blâmable.  En 30 ans, à travers les grèves, les coupures de salaires, la conjoncture politique, ses études de doctorat, son militantisme politique, ses activités d'écrivain, sa fonction de coordonnateur du département de français puis de membre de l’exécutif syndical, le moins qu’on puisse dire c’est que, comme enseignant, s’il a eu des hauts, il a eu aussi des bas. Sa disponibilité a souvent laissé à désirer. Sa priorité a été souvent bien autre chose que l’enseignement.
Le Littéraire a compris l’enjeu derrière les mesures disciplinaires et pour que la lettre de doléances soit retirée de son dossier, en échange, je n'ai même pas eu besoin de lui demander de démissionner du comité d’évaluation de la Directrice générale. Il a signé une intention de bonne conduite et de respect à propos de laquelle je ne me fais aucune illusion. Ce contestataire invétéré est un délinquant et je le traiterai en délinquant. Il me déteste. Je l’ai à l’oeil et il est mieux de cesser ses attaques dans mon dos contre moi devant ses élèves et devant les autres professeurs comme on me l’a rapporté à plusieurs reprises. Mais au moins, il ne viendra pas verser son venin dans un comité d’évaluation qui aura assez d’objectivité pour reconnaître mes réalisations. On m’a informée qu’il se préparait à demander à voir les factures des dépenses d’un voyage en Afrique du nord, les miennes et celles du Directeur des ressources matérielles. Une employée du département des ressources matérielles qui est de leurs amis a commencé à fouiner en ouvrant une enveloppe où se trouvaient des reçus de nos dépenses afin de les passer au syndicat des enseignants pour lequel elle travaille: en effet, elle met de l'ordre dans les documents syndicaux. Pour l'intimider et pour qu'elle ne recommence plus, elle a eu une lettre de réprimandes à son dossier, ça lui apprendra à flirter avec le syndicat des enseignants.  
Je tiens à un renouvellement de mandat pour cinq autres années et je prendrai les moyens pour l’obtenir. Boutefeu m’a ridiculisée devant tous les membres du Conseil d’administration en montrant que la résolution du Conseil exécutif qui le blâmait de sa lettre-bilan de l’an 1 était illégale parce qu’adoptée au mois de juin par deux membres sur cinq donc sans quorum. La page du procès-verbal qui contenait cette résolution a donc été retirée et a été considérée comme n’ayant jamais existé. J’ai perdu la face.  Tous les membres du personnel en ont été informés. J’entends des rires dans les corridors et dans mes cauchemars. J’ai quand même atteint mon but : il ne fait plus partie du comité d’évaluation de la Directrice générale. Malheureusement, il a été remplacé par l’Ingénieur Paul Martin, un professeur de génie électrique qui est plus fatigant que lui parce que encore plus intransigeant surtout quand il pose des questions sur le budget. J’ai dû trouver une autre astuce pour m’en débarrasser. Etant donné que ce comité donne des avis sur le bonus de 6% que peuvent recevoir les deux hors-cadres c'est-à-dire la Directrice générale et le Directeur des études, aucun employé ne peut siéger sur ce comité. Exit l’Ingénieur.  Je suis certaine qu’ils ne veulent pas que mon mandat soit renouvelé.
Revenant à Vénus, déesse de l’amour, on me reproche d’essayer de séduire en prêtant des ordinateurs aux enseignants. J’ai eu le malheur d’écrire que, après un an, le coup de foudre est maintenant terminé. J’entretiendrais des rapports passionnels avec le personnel et avec le Collège. Paraît-il que je suis partisane de la pensée unique et que je ne peux supporter l’opposition. Il est vrai que je suis assez lucide pour ne pas perdre mon temps à essayer de convaincre des gens qui ne penseront jamais comme moi, des gens qui manquent d’envergure et qui me détestent. Toutes ces critiques proviennent de gens qui n’ont jamais rien administré.
En juin 1998, j’ai donné une longue entrevue à la rédactrice en chef du journal local pour faire le bilan de ma première année et répliquer aux attaques dont je suis l’objet. J’ai montré que ce fut une année de grandes réalisations. La journaliste a noté que je déplore que des incidents aient perturbé la vie du collège, notamment la dissidence des étudiants et des professeurs envers certaines propositions. L’article est accompagné de ma photo et  a un titre provocateur : Pour se développer, le collège devra éliminer louvoiement et campagnes de dénigrement. A propos des quatre nouvelles voies de sortie dont nous sommes fiers, le collège s’est montré généreux en les finançant au complet au coût de 160,000 $ pigé dans le bas de laine de 2.4 $ millions. La journaliste a fait un travail honnête en montrant mon dynamisme et mon engagement. Elle a rapporté fidèlement mes propos dans la conclusion de son article. Je me cite. 
Je suis consciente que tous ces chantiers, la révision des tâches et l’apport de nouveaux outils a demandé beaucoup aux gens. Et ils ont collaboré pour qu’on y arrive.   La population a vu le changement qui s’opère parce qu’on a a coeur la réussite de nos étudiants, ce qui est d’ailleurs au centre de notre projet éducatif. Et je voudrais que tout continue sans louvoiement, sans campagne de dénigrement.
Un de mes agents doubles m’a rapporté que Boutefeu a fait une analyse cinglante de mes propos. Il m’accuse de volontairement confondre opposition et critique légitimes avec le dénigrement qui suppose de la mauvaise foi. Quant à l’idée de louvoiement qui décrirait leur attitude de base, il la trouve complètement ridicule et sans fondement et une forme d'attaque gratuite de leur action. Il a dit que je faisais de la projection. Ce qui n'est pas faux car parmi les nombreux reproches  que je leur fais, il y a celui d'être trop directs, ce qui est le contraire du louvoiement.
Ils se sont opposés clairement à la privatisation de la cafétéria, au fait de leur enlever quatre enseignants comme ressources qui seraient utilisées pour financer le Centre de technologies et au financement par les enseignants de quatre nouvelles voies de sorties. Alors où est le louvoiement ? demandent-ils. Notre opposition est ouverte et clairement exprimée.  Ils considèrent que mes propos sont malhonnêtes intellectuellement. La cafétéria ne sera pas privatisée, j’ai financé complètement les quatre nouvelles voies de sortie et j’ai cédé sur les quatre enseignants : ils ont gagné sur toute la ligne alors qu’ont-ils à chialer. Pour quelqu’un à qui on essaie de faire une réputation d'avoir une pensée unique, je me suis montrée très souple. Je suis très contente de cet article du journal local. J’y projette l’image d’une femme dynamique, articulée et raisonnable, ce que je suis d’ailleurs. Pas surprenant que mes opposants soient de mauvaise humeur. C’est un signe que c’était un excellent article. Ils se rendent compte que je suis capable de me défendre. Ils vont finir par me respecter : ils n’auront pas le choix. Mes réalisations auront le dernier mot devant ces dénigreurs professionnels irrespectueux qui sont contre moi pour des raisons politiques qui remontent à loin. En clair, parce que je fais partie de ce qu'ils appellent la clique de libéraux de Ste-Anne-de-Sorel. Je me demande aussi s'ils ne sont pas  misogynes.
Je suis une bâtisseuse. J’adore les rénovations et le collège en avait bien besoin. Transformation de locaux, changements de meubles, peinture harmonisée, quel plaisir de faire du collège un grand chantier de construction et de rénover avec goût pour que les lieux de travail soient à la fois fonctionnels et agréables ! J’aime travailler entourée de beauté. Une belle grande table en chêne pour les réunions du Conseil d'Administration (et du Comité des Relations du Travail: CRT), ça réjouit l’oeil. Je me suis lancé aussi dans un vaste programme d’achat d’ordinateurs pour les élèves qui nous place à la fine pointe de la technologie. Je veux implanter un nouveau programme en environnement et l’Ebéniste, un professeur de biologie (actuellement président du syndicat) qui comprend les intérêts du collège, a fait un travail colossal : avec compétence, il a conçu tout un programme et rédigé les plans d’études d’une quinzaine de cours que nous avons présentés au Ministère. Après de nombreuses démarches où le Directeur des études ne m’a guère impressionnée, les fonctionnaires ont autorisé un programme en environnement-santé et sécurité qui se donne déjà dans d’autres collèges. Je voulais un vrai programme en environnement basé sur les sciences de la nature et qui serait unique pour attirer de la clientèle de l’extérieur de la région. Les fonctionnaires bornés n’ont rien voulu savoir. Ces fonctionnaires sont des gens qui voient petit. Ils ne croient pas qu’on peut attirer à notre collège des élèves d’autres régions. Nous avons dû nous contenter d’un programme de santé et sécurité qui se sert du mot environnement pour attirer des élèves. Le Ministre de l’Education du gouvernement du Parti québécois Sylvain Simard qui a de l'envergure, suite à mes pressions, a autorisé un investissement de plus d’un million de dollars pour rénover le sous-sol et nous équiper. Il interviendra plus tard pour que j'accepte une entente hors cour avec le syndicat des enseignants et Boutefeu. Mais n'anticipons pas.
Pour faire de mon collège un lieu d’excellence et de réussite, nous avons conçu et rédigé un projet éducatif fondé sur des valeurs universelles.  Dans mon collège, il faut des enseignants compétents, dévoués et disponibles qui ne passent pas leur temps à m’attaquer pendant leurs cours et qui respectent leur plan de cours. Dans des visites surprises dans les locaux de professeurs, je me suis aperçue du peu de disponibilité de certains enseignants surtout ceux qui ne demeurent pas dans la région. Ce n’est pas la majorité mais ils nuisent à la réputation du collège. J’ai alors donné l’ordre à l’adjoint à l’organisation scolaire, qui fabrique les horaires, de distribuer les cours sur un minimum de quatre jours et même cinq jours dans le cas de Boutefeu, pour assurer la présence des enseignants au collège. Le Littéraire aura un horaire écartelé sur cinq jours même si cela a pour conséquence de donner un horaire sur cinq jours à une jeune mère de famille qui a trois enfants en bas âge et qui demeure comme lui à Longueuil, ce qui va contre la conciliation travail-famille qui est inscrite dans la convention collective. D’autre part, montrant un peu trop de zèle, avec sa maladresse habituelle, Grandpied demanda aux secrétaires de vérifier si les enseignants donnaient leurs cours de la première minute à la dernière minute de leur horaire et dans le local prédéterminé. Les six secrétaires visées ont refusé cette tâche non prévue à la convention collective du personnel de soutien et je les comprends. Elles ont refusé de jouer les Père Ovide. Elles n’ont aucun intérêt à provoquer des situations de conflit avec les enseignants. Espérons quand même que cette initiative prise en septembre 1999 par l’adjoint à l’organisation scolaire enverra un message clair aux enseignants. En avril 1999, j’avais demandé à l’Adjointe aux programmes de vérifier la présence en classe du Littéraire pour lui rappeler ses devoirs d’enseignant lui qui se donne le droit de juger négativement toutes mes initiatives. Malheureusement, il se méfiait et avait toutes les réponses aux questions sur ses déplacements de locaux. A trois reprises, il était dans une autre classe que celle prévue à son horaire pour profiter d’un grand écran pour visionner le Misanthrope de Molière. Il se servira de cette vérification pour m’accuser de harcèlement. Mais nous ne faisons que notre devoir. Il y a toutes sortes de rumeurs qui circulent à son sujet. En tant qu’ancien, il en prend  parfois pas mal large.
Quelques mois plut tôt, j’ai demandé à l’Adjointe d’aller faire remplir un questionnaire par les élèves de bureautique pour évaluer son enseignement. Comme les cours avaient eu lieu trois mois auparavant, les enseignantes de bureautique d’habitude dociles, refusèrent. J’essayais d’avoir des armes contre lui suite à un malentendu à propos du moment où devait cesser la coupure des salaires de 2.5% du gouvernement Bouchard. Les sept membres du CRT ont écrit une lettre aux membres du Conseil d’administration pour dénoncer le fait que nous voulions faire cesser la coupure en avril, au moment de la signature de la nouvelle convention, au lieu d’en janvier comme cela avait été convenu au niveau national. Nous avons immédiatement corrigé l’erreur faite de bonne foi mais il en ont profité pour en faire une grosse histoire. Pour eux, c’est une preuve de plus de notre incompétence. Nous n’avons pas le droit à l’erreur. A chaque occasion qui se présente, ils en profitent pour souligner ce qu’ils appellent sans ménagement notre incompétence ou notre manque de jugement. Et, de vive voix, ils disent à tout le monde : Regardez comme ces femmes savantes sont ridicules. Elles pensent que n’importe qui peut s’improviser administrateur. Toujours des mots blessants. Je crois de plus en plus qu’ils sont sexistes. Avec des citations de Montaigne, Madame de Lafayette ou Molière qui mettent du piquant et du brio et de la culture dans leurs critiques incessantes virulentes.
Pour remplacer mon choix de juin 1997, je n’aurai pas engagé une directrice des ressources humaines avocate pour rien. Comme membre du comité d’évaluation du directeur des études que mes adversaires nomment Le Soumis, j’ai vu l’évaluation du directeur des études écrite par l’exécutif du syndicat des enseignants formé de l’Ebéniste (président), du Politique (vice-président), du Littéraire (v.p.) et de l’Irlandais (sec.-trésorier) C’est inacceptable. On m’attaque directement en me blâmant d'être responsable de nombreux comportements jugés déficients du directeur des études. On lui reproche de faire la belle devant sa souveraine. Cette attaque vient de l’Irlandais. On se prépare à m’évaluer de la même façon. L’objectif est le même : ne pas renouveler le mandat des hors-cadres que sont la directrice générale et le directeur des études. Mes ennemis prendront tous les moyens pour atteindre cet objectif politique mais je ne les laisserai pas faire. Un de mes espions enseignant qui est vulnérable à cause de conflits dans son département de philosophie et qui me trouve à son goût vient de m’apprendre que ce rapport confidentiel d’évaluation du directeur des études a été lu à haute voix en assemblée syndicale devant une trentaine d’enseignants par l’Irlandais, un professeur d’anglais qui est membre de l’exécutif du syndicat, avec tous les talents oratoires qu’on lui connaît, à la demande expresse d’un membre du syndicat. Paraît-il qu’on pouvait entendre une mouche voler dans la classe où avait lieu l’assemblée syndicale et que ça frappait fort. C’est un texte virulent extrêmement convaincant m’a-t-on dit. Il a été écrit comme un pamphlet par le Littéraire et l’Irlandais. Ces gens-là savent écrire et savent lire.  Donc, on m’attaque ouvertement et on se prépare à m’évaluer négativement. Je me sens menacée. Une campagne de salissage est en cours. Mais cela ne se passera pas comme ça. Ces individus vont voir de quel bois je me chauffe. Comme je contrôle le Conseil d'Administration, j'arriverai à mes fins et mon mandat sera renouvelé pour cinq autres années.
L’occasion de frapper fort m’a été fournie le 24 janvier 2001 quand l’exécutif du syndicat des enseignants a fait l’erreur d’accuser par écrit le directeur des études de double incompétence et de manque de jugement dans le dossier des conditions d’admission à l’examen de reprise avec un tableau qui montre qu’avec les règles en cours, aucun élève n’a mathématiquement accès aux examens de reprise. Cette impossibilité mathématique nous couvre de ridicule. Cette lettre a été envoyée à tous les enseignants et aux autres syndicats du collège. Aux grands maux, les grands remèdes. L’avocate Directrice des ressources humaines a contacté le contentieux de la Fédération des collèges qui fut d’accord pour envoyer aux quatre membres de l’exécutif des enseignants une mise en demeure de se rétracter, de retirer leurs propos injustifiés, diffamatoires et de présenter leurs excuses au directeur des études dans les cinq jours ouvrables. Cette demande de faire des excuses va les énerver ça c’est certain. Ils diront : c’est eux qui se trompent et c’est nous qui devons nous excuser. Attendons la suite. Je suis certaine qu’ils refuseront de s’excuser. Nous serons alors justifiés de les poursuivre en diffamation. On va leur clouer le bec. De toute urgence, je dois créer un rapport de forces sinon ils vont me manger tout rond.  
Au lieu d’obtempérer sans ambiguïté, l’exécutif du syndicat des enseignants a joué au chat et à la souris pendant trois mois et a menacé de m’évaluer pour régler mon cas. Il a retiré ses propos sans les retirer et a dit les regretter mais sans présenter des excuses sincères. Ils ont mis une citation de Montaigne en exergue d'un texte syndical distribué à tout le collège, citation aggravante. Voici l’extrait insultant des Essais :
Nous devons la sujétion et l’obéissance à tous rois, car elle regarde leur office : mais l’estimation, non plus que l’affection, nous ne la devons qu’à leur vertu. Donnons à l’ordre politique de les souffrir patiemment indignes, de celer leurs vices, d’aider de notre recommandation leurs actions indifférentes pendant que leur autorité a besoin de notre appui.
Cette citation apparaît en exergue d’une lettre soi-disant d’excuses envoyée à tous les enseignants, aux autres syndicats, aux membres du Conseil d’administration de manière à ce qu’elle me nuise le plus possible. Cette lettre bien écrite affirme qu’ils n’ont pas le choix d’admettre notre autorité qui est rattachée à notre fonction. Mais que leur estime et même leur affection, nous n’y avons pas droit parce que nous sommes sans vertu, tyrannique, indigne et pleine de vices et, sous entendu, ils nous toléreront mais tout en faisant tout pour que notre mandat ne soit pas renouvelé. De quels vices s’agit-il ? Quand on parle de vices, on pense sûrement au sexe ou à la boisson et sûrement aussi, dans le cas présent, à l’autoritarisme ou à la corruption. Le mot vice est un mot qui parle à l’imagination. Nos actions sont indifférentes, selon eux, car nous sommes inconscientes du mal que nous faisons. Cette citation a été lue par tout le personnel et relue pour la comprendre dans toutes ses implications. Et, évidemment, le Littéraire, qui l’avait dénichée dans un des trois tomes des Essais dans la collection Folio de Gallimard, s’est fait un devoir de mettre les points sur les i et d’expliquer avec précision la citation de Montaigne à quiconque manifestait le moindre intérêt. Il se promène dans tout le collège en insistant sur notre indignité et il est convaincant.  Paraît-il qu’il s’amuse beaucoup et il se félicite de faire connaître un grand écrivain.  L'exécutif du syndicat des enseignants se cache derrière Montaigne pour dire des choses inadmissibles.  Ils veulent la guerre. Ils l’auront et qu’ils ne viennent pas se plaindre par la suite.
Comme la Fédération des collèges a refusé de nous suivre, nous avons fait appel aux services d’un excellent avocat local, Me Robert Ally, belliqueux, dévoué et agressif comme je les aime, spécialiste des divorces et des situations conflictuelles. C'est un ami de la Directrice des études Me Michèle Gariépy.  Cet avocat va nous coûter cher mais ça en vaut la peine.  Et puis, ce n’est pas grave, c’est le Collège qui va payer. Mais si on gagne, c’est le syndicat qui paiera tous les frais de notre avocat. Le 3 mai 2001, sous mon impulsion et sous mes ordres, le directeur des études et le Collège ont envoyé à chacun des quatre membres de l’exécutif du syndicat des enseignants, personnellement, par huissier, une poursuite en Cour supérieure de 80,000 $ pour avoir tenu envers le requérant des propos diffamatoires et méprisants. Ils ont reçu cette poursuite le 15 mai 2001, peu de jours avant les vacances d’été. J’espère que ça va leur gâcher leurs vacances. Nous allons nous faire respecter. Ils veulent détruire notre crédibilité. Et bien, ils vont subir les conséquences de leur effronterie.

Les quatre membres de l’exécutif du syndicat des enseignants, ce 14 juin 2001, viennent de porter plainte contre le Collège (donc contre moi) en vertu de l’article 15 du code du travail. Ils prétendent que la poursuite du Directeur des études et du Collège est une mesure de représailles de la part de l’Employeur suite à l’exercice normal de leur rôle d’officier syndical tel qu’exercé dans la lettre du 24 janvier 2001 concernant une décision d’ordre pédagogique affectant la vie des enseignants et des élèves. Ils réclament chacun 5,000 $ pour atteinte à leurs droits, soit 20,000 $ plus les frais d’avocat. Mesure de représailles ? On verra bien. C’est une façon syndicale de voir les choses qui tombera à l’eau si le juge de la Cour supérieure reconnaît qu’il y a eu diffamation. Une lutte serrée est engagée. Notre avocat en qui j’ai une grande confiance affirme que nous avons une bonne cause. Selon son analyse basée sur une longue expérience, un juge de la Cour supérieure, étant donné son âge et ses antécédents politiques, sera porté à blâmer des enseignants qui n’ont aucun respect de leurs Supérieurs et de l’Autorité et qui insultent par écrit et publiquement le Directeur des études en le traitant d’incompétent, de doublement incompétent et en l’accusant de manquer de jugement. Un juge pensera qu’une institution ne peut fonctionner si les employés essaient constamment de détruire la crédibilité de la Direction. Nous nous servirons de l’article 2088 du Code civil qui oblige un employé à un devoir de loyauté envers son employeur. Selon notre avocat, ces enseignants sont dans le pétrin. Il se frotte les mains. Selon lui et je crois qu’il a raison, nous avons une très bonne cause. Nous ne pouvons pas perdre. Et c’est le syndicat qui paiera les frais de notre avocat qui pourraient s’élever à 50,000 $ en plus d’une amende pour atteinte à la réputation du Directeur des études. Ça pourrait leur coûter 130,000 $ plus les frais de leur avocat donc 150,000$. Mes espions m’ont informée que cette poursuite les a complètement déstabilisés. Ils sont stressés et irritables. C’était mon but. Ils me traitent de folle à lier. C’est bon signe. Enfin, je prends le dessus. Je vais les écraser : c’est ce qu’ils méritent.
Je suis aux oiseaux et cette expression n’est pas une allusion au fait que Le Littéraire, entre autres amabilités, m’appelle tyran tri tri, oiseau belliqueux qui ne tolère personne dans son entourage. Le Littéraire est un des deux représentants des enseignants au Conseil d’administration avec l’Ingénieur.  Il vient de faire une gaffe majeure. Cette fois, il ne s’en sortira pas. Voici ce qui s'est passé à la réunion du Conseil d'administration du 19 juin 2001. On va s’en souvenir longtemps.
Avant la réunion du Conseil, nous avions décidé d’exclure le Littéraire du Conseil d’administration parce qu’il était l’objet d’une poursuite judiciaire de la part du Directeur des études et du Collège ; selon nous, il n’était plus digne de siéger au Conseil du moins jusqu’à ce que la cause ne soit jugée. Le soir même, les prenant par surprise, on a donc ajouté un point à l’ordre du jour de la réunion ordinaire du Conseil du 19 juin 2001 : implication des membres du C.A., pour pouvoir faire une proposition d’exclusion du Littéraire. Or, il ne fut pas nécessaire de voter sur cette résolution. Il s’est passé quelque chose de plus grave. Il s’est exclu lui-même du Conseil d’administration en tenant des propos diffamatoires. Voici comment ça s'est passé.  Le Littéraire a posé des questions sur le budget pour pouvoir m’accuser de ne pas avoir respecté une promesse que j’aurais faite à des enseignants du programme d’Arts et Lettres d’acheter au coût de 25,000$ des ordinateurs pour faire du multimédia. Je ne me souviens pas exactement de ce qu’il a dit mais cela se rapproche de ceci : quand vous avez fait cette promesse lors d'une réunion, vous étiez à jeun! Autrement dit, votre promesse était, en quelque sorte, une promesse d’ivrogne. J’ai compris et je ne suis pas la seule, qu’il me traitait d’alcoolique.  C’était donc ça les vices dont parlait la citation de Montaigne. J’ai immédiatement exigé qu’il retire ses paroles diffamantes et il l’a fait avec sa désinvolture habituelle sans aucune sincérité. Encore un peu et il me traitait d’hystérique, moi qui étais l’offensée. A jeun ? Qu’est-ce que ça vient faire dans une discussion sur le budget du Collège ? Peu importe ce qu’il a voulu dire, ce que j’ai compris est insultant et indigne d’un membre du Conseil d’administration. Le fin lettré comme l’appelle ironiquement le Directeur des études vient de faire une bêtise qu’il paiera cher. Je vais lui apprendre à vivre. Je vais le chasser du Conseil d’administration et je vais le chasser du collège en le poursuivant pour diffamation pour l’obliger à prendre sa retraite. Il enseigne au collège depuis 1969. Il est temps qu’il laisse sa place à un jeune. Il nous a assez écoeurés.
Par courrier recommandé, le 27 juin 2001, le Littéraire représentant des enseignants au Conseil d’administration a été relevé de ses fonctions d’administrateur du Collège. Avec la directrice des ressources humaines, le directeur des études et le président du C.A., nous avons bien pesé nos mots. Les voici : Les propos que vous avez tenus envers notre directrice générale durant l’assemblée ordinaire du 19 juin dernier constituent un manquement grave qui porte atteinte à notre institution et à un de ses administrateurs et qui a entraîné le dépôt d’une plainte en vertu du Code d’éthique.
Cela veut dire que l’exécutif du Conseil a adopté ma version des faits et que des membres du Conseil d’administration viendront témoigner en ma faveur au procès. C’est important de le souligner. Ce même jour, mercredi le 27 juin, mon avocat a envoyé, par huissier, à cet enseignant, à son domicile à Longueuil, une mise en demeure réclamant 150,000 $ en dommages, en mon nom et au nom du Collège. Cette mise en demeure déclare : Vous avez, malicieusement et dans le but de nuire, tenu à l’endroit de la Directrice générale des propos méprisants, mensongers et hautement diffamatoires, le tout dans les circonstances que vous connaissez. Votre attitude a gravement porté atteinte à sa dignité et réputation.
L’étau se resserre. Le Littéraire sera bientôt forcé de prendre sa retraite en échange du retrait des poursuites car je le poursuivrai. Cela va leur coûter cher en frais d’avocats. J’espère que la Fédération autonome du collégial (la FAC) refusera de payer pour le défendre puisqu’il agissait comme administrateur et non comme syndiqué ou comme membre de l’exécutif du syndicat. J’aimerais bien être un petit oiseau pour assister aux débats quant à savoir si c’est la Fédération qui paiera les frais d’avocat ou bien le syndicat local.  Je souhaite qu'ils refusent de payer son avocat.  Paraît-il qu’il va demander au Collège de payer ses frais d’avocat étant donné qu’il a agi en tant qu’administrateur, membre du Conseil d’administration du Collège au même titre que moi. Puisque le Collège paie mes frais d’avocat comme membre du Conseil, le Collège devrait rester neutre et aussi payer ses frais d’avocat puisqu’il est membre du Conseil d’administration tout autant que je le suis. Avant qu’un juge n’ait tranché, on doit présumer qu’il est innocent. Il a commencé à faire des représentations auprès du Directeur des ressources matérielles qui l’a reçu froidement. Le Collège ne paiera pas ses frais d’avocat. Le Collège paiera mes frais juridiques, et c’est parfaitement normal et légitime : nous avons le droit de nous défendre contre de si basses attaques. En temps normal, je sais qu’une administration ne doit pas se servir des Tribunaux mais avec ce triste individu, rien n’est normal. Aux grands maux, les grands remèdes. De toutes façons, si le juge nous donne raison, comme c’est presque sûr, ce sera avec dépens et ils auront à payer tous nos frais d’avocat qui s’élèveront à plus de 50,000 $ en plus d’avoir à payer une amende substantielle pour atteinte à la réputation. Quand ils auront à exiger des membres de tous les syndicats de la Fédération une cotisation spéciale pour payer les dommages et intérêts des deux poursuites et nos frais d’avocats, ils comprendront enfin qu’on ne joue pas impunément avec la réputation des hors-cadres, le Directeur des études et la Directrice générale d’un collège. Cela leur servira de leçon. Ils seront un peu moins arrogants après et nous montreront un peu de respect. On pourrait aboutir à des amendes et frais d'avocats aboutissant à la rondelette somme de 250,000 $. Ils verront qu’abuser de la liberté d’expression, ça peut coûter cher.
De nombreux témoignages de sympathie me sont parvenus au Collège, malgré les vacances, de la part d’employés, de cadres, d’amis et de connaissances qui ont à coeur ma réussite comme directrice générale.  Toute la région m'appuie. On emploie les mots les plus sévères pour blâmer la conduite du Littéraire qui est maintenant connue de beaucoup de monde. Ce qui se répand, c’est qu’il m’a traitée d’alcoolique pendant un conseil d’administration. Le bouche à oreille est très efficace. Plus cette insulte se répand, plus ça lui coûtera cher. D’ailleurs, ça fait longtemps que ce pamphlétaire joue avec le feu. Au moment de la publication de son premier livre, les industriels de la région attaqués vicieusement avaient pensé à le poursuivre mais la famille Simard a reculé de peur d’en faire un martyr du séparatisme. Ce n’est pas parce qu’on est docteur en lettres qu’on peut se permettre de dire n’importe quoi et de diffamer des personnes sincères, respectables et dévouées qui ont pour seul tort de ne pas partager vos idées politiques. Montaigne, Molière et Madame de La Fayette doivent servir à d'autre chose qu'à prétexte à insultes.
Le Littéraire a vite contre-attaqué. Le 3 juillet, j’ai reçu une lettre adressée aux 19 membres présents au Conseil d’administration du 19 juin 2001 où il note en détail les mots utilisés lors de ses questions sur le budget mais au moment où il rapporte les mots utilisés dans son accusation à l’effet que je n’aurais pas respecté un engagement que j’avais pris d’acheter des ordinateurs en Arts et Lettres, selon lui, lors de l’accueil du personnel à l’automne 2000, il prend bien soin de ne rien mettre par écrit sur l’insulte qu’il m’a faite. Il souligne qu’il se réfère à l’accueil du personnel où il y a de la bière et du vin pour justifier l’emploi de l’expression à jeun qui, de toutes façons, était totalement inappropriée et qui lui a sans doute échappé dans le feu de l’action. Son inconscient hostile a été le plus fort. Il essaie de minimiser mais c’est en vain car il recevra bientôt sur la gueule une poursuite en diffamation que nous sommes en train de planifier. Peu importe ce qu’il a dit et son intention, il a fait une gaffe monumentale et nous la lui ferons regretter. Laissons-lui le temps de s’inquiéter et d’avoir peur et prenons plaisir à lui gâcher ses vacances. Mes espions m’ont informée qu’il se sent mal. Il voit le danger et il est très inquiet. Il a organisé une réunion d’urgence de l’exécutif du syndicat en plein été pour obtenir une promesse formelle d’appui financier qui sera entérinée par l’assemblée générale cet automne. Paraît-il que les trois autres membres de l’exécutif du syndicat, malgré leur amitié pour le Littéraire,  n’ont pas beaucoup apprécié se faire déranger en pleines vacances. Pour un enseignant, les vacances, c’est sacré. Il sait qu’il a dit une connerie et il sait que je la lui ferai payer cher. Ce sera la fin de sa double carrière de syndicaliste et d’enseignant. Ce maudit séparatiste prétentieux arrogant de Montréal-Longueuil qui se croit supérieur à tout le monde et qui nous traite de parvenus mercantiles et de satisfaits du statu quo, j’aurai sa peau, je vais l’écraser, l’écrabouiller, le détruire et en faire de la compote.
Le 6 août 2001, mon avocat m’a fait signer une requête en diffamation, atteinte à la réputation et dommages réclamant 100,000 $ pour les dommages que j’ai subis ;  en plus, le Collège réclame aussi 70,000 $ pour dommages. La requête, signifiée par huissier, sera présentée à la fin d’août devant un juge de la Cour supérieure au Palais de justice de Sorel. On verra bien si un membre du conseil d’administration d’un collège a le droit de laisser clairement entendre que la directrice générale, de façon courante, travaillait en boisson, était paquetée comme dira notre avocat Me Ally et, que, conséquemment, ses décisions étaient douteuses. On verra bien s’il y a une justice au Québec. Ça leur coûtera 170,000 $ pour avoir attaqué ma réputation et nui au Collège. Et ils auront à payer les 50,000$ de nos frais d'avocat. Je vais mettre le syndicat dans la rue et son vice-président à la porte. Je répands partout ce qu’il a dit et tout le monde est scandalisé et me presse de me défendre. Ne le manque surtout pas ! Qu’il s’en retourne à Longueuil et qu’il y reste ! est ce que j’entends le plus souvent de la part de mes nombreux amis. Le fait qu'il ne soit pas Sorelois joue contre lui. Ce n'est pas par hasard qu'une écrivaine de talent comme Germaine Guèvremont a fait du thème de l'étranger une des clefs de son oeuvre.
Je suis la plus forte, je serai directrice encore cinq ans, malgré leur campagne de dénigrement contre moi.
La conte-attaque syndicale a commencé. Le 29 août 2001, les douze coordonnateurs de département sous l’impulsion de l’Irlandais et de l’Ebéniste qui sont coordonnateurs du département de Langues modernes et des Sciences ont envoyé une lettre aux membres du Conseil d’administration. Les douze l'ont signé.  En voici le contenu essentiel.
L’assemblée des coordonnateurs et coordonnatrices de département dénonce le type de gestion par judiciarisation des relations de travail au Cégep. En conséquence, l’assemblée demande au conseil d’administration de prendre les mesures nécessaires afin de mettre un terme à l’utilisation des moyens juridiques dans la gestion du Collège.
Mes adversaires sont habiles quand il s'agit d'obtenir des appuis. D’autre part, comme je le redoutais, l’assemblée générale du syndicat des enseignants a donné à son exécutif le mandat de procéder à une évaluation exhaustive de mon premier mandat avec un long questionnaire à remplir par chacun des enseignants avec la possibilité de faire des commentaires critiques. Une rumeur circule à l’effet que l’Etudiante Lorraine Bourret collabore avec le syndicat des enseignants. Elle a de l’admiration pour le Littéraire qui lui a fait lire l’Oeuvre au noir de Marguerite Yourcenar.
Hélas ! les poursuites contribuent à les motiver encore plus et me font un tort considérable car les enseignants les désapprouvent. Je me sens menacée. L’assemblée syndicale a voté aussi le mandat de boycotter toutes les activités non prévues à la convention collective pour protester contre les poursuites. Mes espions, dont certains sont des enseignants, m’ont dit que la Fédération autonome du collégial (la FAC) paiera tous les frais d’avocat des membres de l’exécutif du syndicat et les frais d’avocat du Littéraire qui pourtant est poursuivi comme administrateur, de telle sorte qu’ils n’ont plus rien à craindre. Je me demande si je ne devrais pas retirer la poursuite contre l’exécutif du syndicat pour ne garder que celle contre le Littéraire. J’y pense sérieusement.
Je commence à recevoir des avis non sollicités. Chaque fois que j’ai à rencontrer un enseignant, celui-ci, après avoir réglé le sujet principal de sa visite, me dit poliment que je fais fausse route avec les poursuites. Que l’administration avait tort sur les examens de reprise et devrait le reconnaître humblement. Que le programme d’Arts et Lettres a un besoin urgent d’ordinateurs. Que le Littéraire est de bonne foi et veut le bien du collège. Que ma poursuite personnelle contre lui est absurde car celui-ci n’a pas dit ce que je prétends qu’il a dit et n’a pas le sens que je lui donne : personne, de bonne foi, ne croit que je suis alcoolique. Ce n’est pas son genre d’attaquer les administrateurs à partir de leur vie privée. Que dans une région de tire-bouchons comme Sorel-Tracy, personne ne lève le nez sur la boisson et que ce n’est pas un problème. Et que, de toutes façons, il n’est pas du genre à juger les gens et à jouer les moralisateurs. En trente ans, il n’a jamais attaqué la personne d’un administrateur et pourtant Dieu sait s’il en a eu des conflits. Une seule fois il est allé sur un terrain glissant en informant tout le monde qu’un directeur des études qui faisait prendre les présences à l’entrée de l’auditorium et qui s’était déclaré malade au lieu de prendre la parole comme prévu lors d’une journée pédagogique avait été vu le jour même chez Rona (par le Théâtral qui l’avait dénoncé, le Grammairien dit Le courtisan servant de messager) et s’était esquivé rapidement lorsqu’il avait constaté qu’il avait été vu.
Tout le monde défend le Littéraire, je n’en reviens pas. Même ceux qui disent ne pas être de ses amis me désapprouvent. Même les enseignants retraités s’en mêlent. Le Beauceron, qui ne l'aime pas et avec qui il a été en conflit dans son département me dit de penser au bien commun du Collège et d’envisager les conséquences : le Collège est déjà en plein malaise car j’abuse de mon pouvoir; l’image du Collège sera affectée avec une baisse possible de clientèle car tout le monde est au courant du conflit et tout le monde en parle dans la région même si le journal local n’en parle plus à cause du sub judice. Certains m’accusent d’avoir fait des poursuites pour empêcher le journal local de parler des problèmes du collège. On me dit que des contacts sont pris pour que le conflit soit révélé au niveau national dans les grands journaux ce qui pourrait beaucoup nuire à la réputation du collège. Beaucoup de gens disent que je gaspille l’argent des contribuables en frais d’avocat. On nous soupçonne même de prolonger le conflit pour enrichir l’avocat local qui serait de nos amis ou, du moins, l’ami de l’Avocate, directrice des ressources humaines. Ça devient lourd. Le Littéraire est loin d’être isolé. Je constate qu’il jouit d’une certaine popularité. Malgré ses gros défauts, le Littéraire est estimé. Ceux qui ont lu ses livres ou qui partagent son option politique l’admirent. Les milieux ouvriers aiment son style baveux. On aime son style irrespectueux et irrévérencieux. Les ouvriers aiment bien quelqu’un qui écoeure les bourgeois. Les indépendantistes de la région ont du respect pour son engagement politique qui date de 1966. On dit ouvertement que je suis sur son dos parce que je suis jalouse de sa culture. Selon eux, je suis une maudite libérale qui abuse de son pouvoir de directrice pour faire de la petite politique partisane. L’affaire prend de l’ampleur : je ne suis pas certaine que j’en sortirai gagnante. Le climat au collège est de plus en plus lourd. Les enseignants en très grande majorité refusent de participer à toutes les activités sociales que j’organise. A 95%, ils boycottent tout. C’est frustrant. Ça m'écoeure. Et ceux du département de mécanique par exemple  qui participent aux activités sociales que j'organise sont traités de téteux qui s'enrichissent en donnant des cours du soir à l'éducation des adultes, ce qui est du double emploi que dénonce le syndicat par principe.
A cause du projet des enseignants de m’évaluer, j’ai accéléré le processus de mon renouvellement de mandat par le Conseil d’administration. Le syndicat des enseignants n’aura pas terminé son évaluation et mon mandat sera renouvelé pour cinq autres années. C’est moi qui contrôle le Conseil d’administration, pas eux. Cette fois-là, je les aurai déjoués.

Le 10 octobre 2001, pour échapper aux questions du Comité d’éthique et de déontologie du Conseil d’administration, le Littéraire qui représente les enseignants a démissionné du Conseil et envoyé sa lettre de démission à tous les enseignants et aux membres du C.A. Il en profite pour m’attaquer.  Le Littéraire me reproche de sous-financer les programmes de Sciences humaines, de Sciences de la nature et surtout d’Arts et Lettres puisque ce programme n’a pas encore ses ordinateurs (une dépense de 25,000 $) même s’il y a plus de 650,000 $ dans la réserve accumulée du Collège. Sous-entendu, je favorise les programmes techniques au détriment des programmes pré-universitaires. Cette administration, écrit-il, pourtant ne se gêne pas pour dépenser des fonds publics en poursuites frivoles. Pour cette administration, la fin justifie les moyens comme on l’a vu dans la menace d’aller en appel d’offres dans le dossier de la cafétéria et comme on le voit dans la judiciarisation des relations de travail dénoncée à l’unanimité par les douze coordonnateurs de départements. Ce qui est grave, c’est que La Direction fait comme si elle ne savait pas que ces méthodes d’intimidation pourrissent notre climat de travail. 
Ce qui est terrible, c’est que je constate que la très forte majorité des employés, cadres, professionnels, soutien et enseignants pensent comme lui. Il termine par un coup bas au Président du conseil à qui la lettre de démission est adressée : Je démissionne comme membre du Conseil d’administration que vous co-présidez avec la directrice générale. Sous-entendu, si je co-préside, lui, il ne préside pas de façon autonome. Il est donc dominé par moi comme le Directeur des Études qui poursuit l’exécutif du syndicat des enseignants. Peu importe, j’ai forcé Boutefeu à démissionner comme représentant des enseignants : me voilà débarrassée d’un adversaire qui n’avait pas sa place au Conseil d’administration de mon collège et qui posait des questions déstabilisantes sur les dépenses et surtout l’International. Une rumeur circule à l’effet que nous avons poursuivi le syndicat des enseignants et que nous avons chassé le Littéraire (vice-président du syndicat) du C.A. parce que nous avons des choses à cacher. Nous tenterions de faire diversion, d’occuper l’exécutif du syndicat et de le déstabiliser pour les empêcher d’aller au fond des choses du point de vue des frais de représentation, des voyages et ce qu’ils appellent les combines autour de l’International. Quelles combines ? En Afrique, j'étais accompagnée par le Directeur de l'équipement. On répand toutes sortes de rumeurs affriolantes.  Vous voyez ce que je veux dire... Je fais référence aux enveloppes de dépenses faites lors d'un voyage en Afrique qui ont été ouvertes par une employée… Rumeurs sur ma vie privée si efficaces dans un petit milieu comme le nôtre. 
L’avocat syndical conteste ma requête en diffamation du 24 octobre 2001 en prétendant que l’enseignant n’a jamais traité la requérante d’alcoolique et que c’est moi qui ai fait la diffusion de propos que l’intimé n’avait pas tenus et que je suis la seule responsable de la diffusion de propos erronés qui entachent ma réputation. Ma réclamation est donc abusive et grossièrement exagérée et la poursuite frivole. C’est l’arroseur arrosé. S’il y a procès, on trouvera six ou sept témoins qui diront comme le Littéraire et six ou sept témoins qui diront comme moi et on ne sera pas plus avancé. On sera dans un cul-de-sac. La seule façon d’en sortir est de retirer les poursuites mais il n’y a rien de pressé. Attendons. Continuons de les occuper, de les déstabiliser et de les stresser. Ça leur apprendra qu’il y a un prix à payer quand on attaque  une femme de pouvoir comme moi.
Mon avocat local, l’avocate directrice des ressources humaines et moi-même avons préparé l’interrogatoire après contestation (the discovery procedure) qui aura lieu le 31 octobre 2001. Ce fut une réunion très fructueuse. Nous avons repassé le déroulement des événements du Conseil d’administration du 19 juin 2001 et les paroles qui ont été prononcées par les uns et les autres. Nous avons décidé de ne pas tenir compte de la lettre du 3 juillet du Littéraire où il insiste pour dire qu’il se référait à un accueil du personnel où il y avait de la boisson bière et vin, ce qu’il appellera une fête dans l’interrogatoire du 31 octobre. C’est sa version des événements : nous en avons une autre, c’est tout. Le juge tranchera entre la parole d’une directrice générale estimée de tous et un enseignant délinquant et asocial qui ne respecte rien et insulte les administrateurs…et qui n'est pas de Sorel… Qui croira le juge ? Une personne distinguée, respectable et dévouée comme moi qui a une belle apparence, qui a de la classe, qui a une réputation sans tache et qui s’exprime bien ou cet enseignant qui adore insulter les gens surtout ceux qui n’ont pas ses idées politiques et cela depuis toujours, ses écrits le prouvent hors de tout doute. Nous allons présenter contre lui une preuve de caractère qui sera dévastatrice. Il va payer pour son dédain des libéraux qu’il appelle des arrivistes, des satisfaits, des mercantiles, des prétentieux, des parvenus, des médiocres, des partisans du statu quo qui les avantage.
Dans son interrogatoire du 31 octobre, le Littéraire nie avec fermeté l’interprétation que nous faisons de ses propos. Il précise qu’il a dit se référer à l’accueil du personnel tandis que moi, je prétends qu’il parlait d’une rencontre en département. Voici, selon lui, ce qu’il a voulu dire : Venez pas me dire que c’est dans l’enthousiasme que procure un bon verre de vin que vous avez promis à mes collègues d’acheter des ordinateurs et que cet enthousiasme circonstanciel vous dispenserait de tenir parole. Quand j’ai affirmé qu’il avait dit : Ce soir-là, vous étiez à jeun, s’il avait eu une arme dans ses yeux, je serais morte foudroyée car selon lui, il n'a jamais dit cette fois-là. Il va m'accuser d'avoir inventé ce propos de toutes pièces pour l'incriminer.  
Ma réaction le soir du 19 juin serait donc le résultat d’une déformation de ses propos. Il a répondu aux questions de mon avocat avec beaucoup d’aplomb et je dirais même avec arrogance. Il a du mépris pour les manoeuvres de mon avocat. Il n’a pas de complexe et personne ne l’impressionne. On voit bien qu’il adore les conflits et les affrontements. (Je me rends compte qu’en l’attaquant, je joue son jeu.) Quand mon avocat l’a accusé directement et ouvertement d’avoir laissé entendre que j’étais habituellement paquetée quand j’exerçais mes fonctions, il a répondu d’une façon qui ne ment pas : Voyons donc ! Vous n’êtes pas sérieux ! Je n’ai jamais pensé ni dit cela ! Et tout le monde le sait. Est-on devant un malentendu ? Je commence à penser que je me suis énervée pour rien le soir du 19 juin. Tout le monde se demande pourquoi, ce soir-là, j’ai grimpé dans les rideaux pour employer leur expression. C’est vrai que j’étais sur les nerfs parce qu’on avait un problème de quorum et que j’avais décidé d’expulser Le Littéraire du Conseil d’administration. Les deux enseignants membres du Conseil n’avaient qu’à quitter la réunion pour nous empêcher de voter la résolution (car nous n’aurions pas eu quorum) qui exclurait mon ennemi du Conseil d’administration et ils l’ont d’ailleurs fait : ils sont partis au milieu de la réunion et nous n’avons plus eu quorum.  
J’ai joué mon rôle de victime à la perfection. A la fin des interrogatoires dont les propos ont été notés mot à mot par une sténo, à la sortie de la salle du Palais de Justice, j’ai pris les mains de Me Jacques Lamoureux, l’avocat du syndicat, en lui disant avec une voix larmoyante : Je ne suis plus capable de prendre un verre de vin sans être traumatisée. C’était très bien joué. Hélas, mon charme n’a pas opéré. L’avocat a figé et m’a lancé un regard glacial. J’ai bien vu qu’il a pensé que j’en faisais trop. Ils ont dû se dire que je méritais l’Oscar de la meilleure actrice de l’année. Je continue la lutte mais l’option de retirer les poursuites quand elles auront eu leur plein effet est de plus en plus sur la table.
Un des enseignants qui me sert d’espion m’a remis une lettre ouverte non signée (mais on sait d’où ça vient) qui m’est adressée: elle a été laissée par inadvertance (!) sur un des photocopieurs. Elle est datée du 6 novembre 2001 et s’intitule : Pourquoi ça ne va pas bien au collège. Je pense qu’elle a été laissée volontairement sur le photocopieur pour qu’elle se rende à moi parce qu’ils n’oseront pas la publier.* C'est une preuve de leur acharnement contre moi et ça donne une idée du contenu de la campagne de dénigrement dont j’ai été l’objet et qui a conduit 70% des enseignants à s’opposer à mon renouvellement de mandat. Cette accumulation de faits et d’opinions négatives fait de moi une directrice exécrable et je suis bien évidemment tout le contraire de cela : je suis une directrice dévouée qui se tue au travail pour relancer le collège. Telle n’est pas la perception de ces gens-là qui n’ont pas cessé de m’en vouloir après les deux incidents des premiers mois de mon mandat. Aurait-il fallu que je choisisse le Syndicaliste comme Directeur des ressources humaines ? Pouvais-je ignorer la plainte qui avait été faite contre Le Littéraire ? Dans ce bilan, il n’est pas du tout question de ce que j’ai fait de bien en quatre ans. Vous avez donc une vision partielle, partiale, profondément injuste et foncièrement malhonnête. Pour eux, je ressemble à la méchante sorcière aux ongles longs des films pour enfants de Walt Disney. C’est de la caricature et de la caricature extrêmement hostile. N’oubliez pas que cette lettre n’a jamais été rendue publique. Mais tout ce qu’elle contient a été répété dans des conversations de corridors dans une campagne de dénigrement contre moi.  
*Voir en annexe.
Ce bilan très négatif, cette charge contre moi exprime la façon de voir de mes adversaires. Ils n’ont pas diffusé ce bilan mais tout ce qu’il contient a été propagé oralement par les uns et les autres. C’est très injuste de laisser entendre que je n’ai rien fait de bien en quatre ans. Il ne reste pas beaucoup de place pour le dialogue. Je n’ai pas le choix. Je vais me battre. Non seulement je ne partirai pas, mais je vais rester. C’est volontairement que je n’ai pas souligné le retour du professeur recyclé de la philosophie à l’anglais. L’Irlandais se comporte en adversaire alors il ne doit pas s’attendre à des félicitations. 
Ce genre d’attaque à fond de train me donne des chaleurs et me rappelle que j’en suis arrivée à ce moment difficile de la vie des femmes, la ménopause qui, dans mon cas, est aggravée par ce genre de dénigrement. L’Ebéniste, président du syndicat, qui est professeur de biologie et que j’ai rencontré récemment à propos des plans de cours du nouveau programme d’environnement m’a vu rougir de colère devant tant d’hostilité syndicale. J’ai fait l’erreur de lui dire : Vous me donnez des chaleurs. Il m’a fait remarquer que mon refus de lui donner le budget pour participer à un congrès sur l’environnement l’a ulcéré. C’est de la mesquinerie a-t-il dit.
Un de mes espions était assis à côté des membres de l’exécutif syndical en grande conversation à la cafétéria. Ils parlaient de leurs vacances. Il était question d’un voyage du Littéraire autour de la Gaspésie en passant par la vallée de la Matapédia et de la Baie des Chaleurs.

L’Ebéniste venait de raconter sa rencontre avec moi et avait dit à ses collègues et amis que le syndicat me donnait des chaleurs ce qui les fit évidemment sourire. Tout à coup on entendit un immense éclat de rire. Un enseignant qui me servait d'espion s’approcha d’eux en leur demandant  ce qu’il y avait de si drôle. Le Littéraire raconta l’histoire de mes chaleurs et de la Matapédia et ajouta ce qui avait provoqué l’hilarité générale : On va dorénavant l’appeler la Baie des Chaleurs ! Après avoir tenté de me ridiculiser en appelant mon bureau Le Carré royal, il vont maintenant dire, entre eux, chaque fois qu’ils feront un bon coup contre moi, La Baie des Chaleurs se réchauffe ! C’est d’autant plus drôle, pour eux, que le Politique a l’habitude de dire, quand l’Administration pose des gestes qu’il réprouve : Elles me réchauffent. Il n’y a pas de doute : ce sont des misogynes détestables. Moi qui suis d’un naturel positif et qui, jusqu’ici, n’avait que très rarement éprouvé des sentiments de haine, je sens monter en moi une agressivité que j’ai peine à contrôler. Je les haïs et je sens monter en moi le goût de tuer comme les personnages des drames de Shakespeare.
Comme prévu, le Conseil d’administration du 15 novembre 2001 vient de renouveler mon mandat pour cinq autres années. Je suis très sensible à cette marque de confiance obtenue malgré l’acharnement des quatre membres de l’exécutif du syndicat des enseignants contre moi. J’ai écrit une lettre à tout le personnel pour exprimer ma joie et la partager avec tous ceux qui savent reconnaître mes réalisations et qui apprécient mon dynamisme et ma volonté de changement. Je me cite.  Nous allons améliorer le climat de travail grâce à la bonne volonté de tous en ayant une attitude de bonne foi dans la recherche des solutions. Quand on veut, on peut. Nous allons y arriver. Pourvu que nous ayons le goût du bonheur. J’ai réussi à déjouer ceux qui me détestent. Je suis la plus forte. 
Mes espions m’ont informée que ma lettre a enragé l’exécutif du syndicat des enseignants : ils la qualifient de triomphaliste et de provocatrice. Pour eux, dans le contexte des poursuites qui les traumatisent, mon enthousiasme est indécent. Ils n’ont certes pas le goût du bonheur ! Pauvres eux autres ! Je serai encore là pour au moins cinq ans. Quatre ans de dénigrement et de négativisme qui s’envolent en fumée, ça doit être dur à avaler. Ce sont de mauvais perdants. Il serait temps qu’ils se rendent à l’évidence. Je suis la plus forte et, sans vouloir me vanter, pour ce qui est de la stratégie, je ne suis pas si mauvaise que cela. Mon ennemi n’a plus le choix. Il doit s’avouer vaincu et partir la queue entre les jambes, excusez-moi mais à force de les combattre, leur vulgarité masculine déteint sur moi.
Parlant des enseignants que j’appelle mes espions, il faut savoir qu’un certain nombre d’enseignants désapprouvent les boycotts et m’expriment beaucoup de sympathie. Les renseignements qu’ils me donnent sont précieux. Je me sers aussi d’eux pour faire passer des messages. Je les appelle des espions mais je crois que ce sont plutôt des agents doubles. J’ai dit clairement à l’un d’eux, le même qui se disait stratégique et non hypocrite, que les poursuites ne seront pas retirées tant que Le Littéraire ne prendra pas sa retraite. Je suis sûre que le message s’est rendu. Boutefeu n’a pas sa place dans mon collège. C’est lui ou moi. Or, mon mandat vient d’être renouvelé pour cinq autres années. Il devrait admettre sa défaite et partir. Qu’il laisse sa place à un plus jeune.
Catastrophe : ils ne lâchent pas. Pire, la contre-attaque du syndicat des enseignants continue de plus belle. Le renouvellement de mon mandat pour cinq ans les motive encore plus. Ils ont décidé de me faire la vie dure. Un bulletin d’information syndicale nommé L’Huissier vient de paraître. Les trois premiers numéros du 7 décembre 2001, du 14 janvier 2002 et du 18 janvier 2002 ont été distribués à tous les enseignants et aux différents syndicats du Collège.
L’Huissier du 7 décembre contient une citation en exergue d’une ironie détestable qui fera sourire ceux qui ne m’aiment pas : L’humeur ambitieuse de la Reine lui faisait trouver une grande douceur à régner. Il s’agit de la Reine Catherine de Médicis que le roi trompe ouvertement ; alors, elle règne sur quoi au juste ! C’est dans la Princesse de Clèves de Madame de La Fayette que le Littéraire étudie en classe avec ses élèves. Il doit bien s’amuser en faisant une mise en situation où je suis en vedette pour capter l’attention de ses élèves.
Mais il y a plus grave. Puisque mon mandat a été renouvelé pour cinq ans, ils ont décidé de faire ce qu’ils appellent malicieusement de l’évaluation formative. Les hypocrites, ils disent que c’est pour mon bien et le bien du Collège. Ils se vengent ainsi de toutes les tentatives d’évaluation des enseignants que font les administrations depuis des années. Rendez-vous compte. Ils publient en détail le Rapport d’évaluation du premier mandat de la directrice générale même si ce rapport devait rester confidentiel. Alors, en réplique, cédant à la provocation, j’ai commis une erreur : lundi le 28 janvier 2002, j’ai envoyé un Communiqué signé La Direction à tout le personnel enseignant. C'est à leur tour de  reconnaître mon style.
Nous profitons de ce Communiqué pour vous faire part que nous déplorons que votre exécutif syndical continue la publication d’écrits qui enfreignent, selon notre interprétation, les notions de confidentialité, de respect des renseignements personnels et qui sont mensongers à plusieurs égards. En effet, selon l’éthique la plus minimale, l’évaluation d’une personne doit se discuter à l’intérieur d’un processus très confidentiel. Nous vous demandons d’être vigilants et de mettre certains bémols sur les écrits qui vous sont transmis. Si quelqu’un d’entre vous ressent le besoin d’avoir des informations supplémentaires ou des réponses à leur questionnement, nous vous rappelons que notre porte est grande ouverte pour vous recevoir individuellement et collectivement.
Dans une demi-page du journal local du 12 février 2002, sur une colonne, je viens de faire publier le message suivant.
Merci ! Merci à nos enseignantes et à nos enseignants pour l’excellent travail réalisé ! Le taux de réussite des étudiantes et des étudiants inscrits aux programmes de DEC est passé de 80.3% à l’automne 1995, à 89.7% à l’automne 2001. Une augmentation de 9.4%…
Suivent les noms de tous les enseignants du Collège. Ce message de félicitations a été publié pour influencer les enseignants car, par l'Huissier du 7 février, l’exécutif du syndicat consulte ses membres quant à la décision de poursuivre la Direction à cause de mon communiqué du 28 janvier 2002 où je traite de menteurs les membres de l'exécutif syndical.
Mon communiqué du 28 janvier 2002 a provoqué une contre-attaque foudroyante du syndicat. Les quatre membres de La Direction (Directrice générale, Directeur des études, Directeur des ressources matérielles, Directrice des ressources humaines) et le Président du Conseil d’administration ont reçu la visite du huissier, ce 28 février 2002. C’est une mise en demeure qui exige de se rétracter et de retirer les propos tenus sur les écrits mensongers du syndicat avec des excuses écrites à chacun des quatre membres de l’exécutif du syndicat. Mon Communiqué du 28 janvier contiendrait des affirmations injustifiées, diffamatoires et inacceptables et le Syndicat ne saurait tolérer d’attaque aussi indue à l’endroit de ses officiers syndicaux. Pour nous baver, ils reprennent le mot à mot de notre poursuite du 31 janvier 2001. Ils ont un an pour nous poursuivre pour diffamation. Hier, ils ont déposé un grief réclamant 35,000 $ pour non respect du droit de représentation du syndicat parce que j’ai invité les enseignants à venir me voir à mon bureau en passant par-dessus l’exécutif du syndicat. Avec les 20,000$ de la plainte au Tribunal du travail, nous sommes rendus à 55,000$. Poursuite possible, grief, plainte au Tribunal du travail, échec de la médiation, leur rapport de forces augmente. Ils nous reprochent de les traiter de diffamateurs avant que la chose ne soit jugée et de les traiter de menteurs. Ils vont nous poursuivre car ils appliquent le principe inspiré du droit romain : ce qui est bon pour minou est bon pour pitou.  Encore une fois, ils ont les rieurs de leur côté. Nombreux sont ceux qui observent les coups donnés de part et d’autre et qui rient. La Croisière s'amuse.
Dans un Communiqué daté du lundi 11 mars 2002 et signé La Direction, nous annonçons que la médiation n’aura pas lieu et nous admettons que nous sommes dans une impasse en écrivant : l’audition des requêtes aura lieu en novembre et décembre 2002 ; il faut essayer de sortir de l’impasse avant cette date. C’est un aveu qu’ils prendront pour un signe de faiblesse.
Mes ennemis font des démarches pour faire connaître à tout le Québec le conflit qui nous oppose et pour dénoncer l’usage de la Cour supérieure à des fins politiques et antisyndicales avec les fonds publics. Des journalistes me téléphonent pour avoir ma réaction. Est-ce vrai que je fais des poursuites-bâillons ? Je refuse de commenter en disant que ce sont les Tribunaux qui trancheront.  Leur texte s’intitule : Pour un vrai pouvoir au féminin et ils veulent qu’il soit publié dans Le Soleil, Le Devoir et  la Presse. Ils ont même contacté le Journal de Montréal. Je crois que leur texte ne sera pas publié parce que les journaux ont peur comme la peste des poursuites. Je leur ai dit que c’est moi la victime et non pas le syndicat et que j’avais le droit de me défendre contre des attaques diffamatoires. Ils ne réussiront pas à projeter au niveau national un conflit qui doit rester local. Il faut que je trouve le moyen de me procurer ce texte.
Mes collègues de la Direction et du Conseil d’administration commencent à en avoir assez. Il faut sortir de l’impasse. Le président du Conseil d’administration n’a pas du tout aimé être dérangé pendant son voyage de chasse dans la région de Lanaudière pour venir témoigner devant la Commissaire Louise Verdone au Tribunal du travail. Celle-ci, le sourire en coin,  l’a taquiné en lui suggérant d’aller chasser dans les rues de LaSalle où un chevreuil circulait librement. Il ne l’a pas trouvée drôle. La Commissaire n’est pas la seule à se moquer de nous. Le directeur des études a dû poireauter toute une journée dans l’antichambre pendant que la directrice des ressources humaines et moi avons ramé en réponse aux questions pointues de l’avocat syndical sur les différentes versions de la politique institutionnelle d’évaluation des apprentissages sous l’oeil amusé des quatre membres de l’exécutif du syndicat des enseignants. On nous questionne en détail sur les différentes versions de la Politique institutionnelle d’évaluation et sur les conditions pour accéder à l’examen de reprise et nous pataugeons là-dedans. L’Huissier  en a profité pour souligner que la journée perdue par le Directeur des études au Tribunal du travail diminuerait la présence formelle et informelle du directeur des études sur les lieux du collège. Ce jargon avait été utilisé dans un document interne d’évaluation du Directeur des études. Mes collègues n’ont pas du tout apprécié de recevoir la visite du huissier. Dans un petit milieu comme le nôtre, ça fait jaser. Si ça continue, nous serons bientôt les dindons de la farce si ce n'est déjà fait.
Tenant compte de l’ensemble des données disponibles, la Direction du Collège a proposé le 17 mai 2002, un Projet de règlement et un Protocole d’entente qui exige le respect des personnes de la part du Syndicat et qui prévoit le retrait des poursuites le 30 juin 2003 à condition que le Syndicat ait démontré, pendant un an, par sa conduite et ses écrits, qu’il était capable de ce respect des personnes sans lequel aucune institution ne peut vivre. Vous avez bien lu juin 2003. J’étire l’élastique. Cette proposition patronale de retirer les poursuites dans un an seulement a provoqué un tollé de protestations et a été rejetée unanimement par l’Assemblée générale des enseignants. L’exécutif du Syndicat a fait adopter son propre projet de règlement qui exige le retrait immédiat des poursuites. Ce retrait serait le résultat d’une rencontre intensive de trois jours à compter du 12 août 2002 dans un hôtel de Montréal en présence de la médiateure.

Cette rencontre n’a pas eu lieu. Lors d’une réunion tenue à Montréal le 25 juin pour préparer celle du 12 août, la médiateure a retiré son offre de service suite à l’envoi par le Syndicat aux membres du Conseil d’administration de documents d’évaluation formative de la directrice générale qui, selon la médiateure démontrent une stratégie de confrontation et une personnalisation incompatibles avec la médiation. Le Syndicat a offert de nous rencontrer quand même mais nous avons refusé. Il va falloir qu’ils cessent d’évaluer une directrice générale qui vient de voir son mandat renouvelé pour cinq ans. Leur attitude revient à contester ouvertement la décision unanime du Conseil d‘administration. C’est inacceptable et intolérable. Ce sont des anarchistes. Ils ne respectent rien.
Le premier numéro du Huissier de l’automne daté du 15 août 2002 nous fait encore mal paraître en informant les enseignants que nous avons refusé les trois jours de rencontre de médiation. Ils ironisent sur mon affirmation selon laquelle j’étais en mode de grande écoute, ce qui serait contradictoire avec notre refus de négocier. Selon eux, il est faux que nous recherchions un règlement à l’amiable et ils donnent la chronologie juridique fort lourde de l’automne 2002 avec les auditions devant la Commissaire du travail les 16, 17 et 18 septembre ; le 4 novembre, le procès dans la cause du directeur des études et le 2 décembre, le procès dans la cause de la directrice générale, avec l’indication de la menace que le 28 janvier 2003 est la date limite pour déposer une requête en diffamation contre les quatre membres de la Direction et le Président du CA.
Le deuxième Huissier daté du 5 septembre contient une Lettre ouverte à la directrice générale précédée d’une citation de Montaigne qui décrit leur philosophie de l’action. La voici. 
La plus commune façon d’amollir les coeurs de ceux qu’on a offensés, lorsque, ayant la vengeance en mains, ils nous tiennent à leur merci, c’est de les émouvoir par soumission à commisération et pitié. Toutefois, la braverie et la constance, moyens tout contraires, ont quelquefois servi à ce même effet.
Selon cette citation, je veux leur soumission mais tout ce que j’aurai de leur part, c’est braverie et constance. Admettent-ils vraiment que je les tiens à ma merci ? C’est encore de l’ironie. L’objet de cette lettre ouverte : mes nominations d’enseignants que j’ai contactés un par un parmi les moins politisés sur mon comité pour la préparation d’un nouveau plan stratégique et qui ont accepté mon offre. Or, je viens d’apprendre que ces nominations sont illégales. J’ignorais que je devais passer par le Syndicat. Ça, c’est l’oeuvre du Syndicaliste Daniel Lussier. La Convention collective dit et je ne le savais pas : Lorsque le Collège forme un comité qui comprend des enseignants, seul le Syndicat est habilité à les nommer. C’est clair. Mon avocate directrice des ressources humaines l’ignorait aussi. Ils en profitent pour souligner lourdement que nous sommes des incompétentes et que nous ignorons la Convention collective pourtant signée par la partie patronale.  Les enseignants qui avaient accepté de faire partie du comité stratégique et qui nous étaient sympathiques sont furieux car ils étaient de bonne foi. C’est une autre petite victoire du Syndicat des enseignants. Le syndicat revient encore sur les besoins d’amélioration dans le fonctionnement du Collège tels que révélés par le processus de mon évaluation par les enseignants. Ils écrivent : Pas besoin de faire une enquête royale pour admettre la pertinence des analyses et des recommandations du rapport de la firme que nous avons engagée. Le premier devoir d’une directrice générale qui se dit en mode grande écoute est de relire ce rapport et de l’appliquer en commençant par le retrait rapide et sans conditions des poursuites judiciaires qui nuisent au climat de travail. Ils me fatiguent au plus haut point avec leurs critiques soi-disant constructives et leur évaluation dite formative. Une fois de plus, ils me narguent.
A l’assemblée générale du 26 septembre 2002, l’exécutif du syndicat a reçu le mandat unanime d’obtenir la ventilation précise des frais d’avocats encourus par le Collège dans les deux poursuites. Si nous refusons de leur donner les chiffres, ils iront devant la Commission d’accès à l’information. Ils n’auront pas les chiffres. Qu’ils aillent devant la Commission ! Ils répandent la rumeur qu’on a gaspillé plus de cinquante mille dollars (ce qui est vrai) en frais d’avocats sans compter le temps et les énergies perdues par les administrateurs. Chaque fois que nous refusons une demande de budget, nous nous faisons mettre sur le nez ce gaspillage de fonds publics et la BMW de la directrice des ressources humaines stationnée devant les bureaux de l’avocat local qui sont situés à côté du Carré Royal. Ils disent : Vous seriez bien mieux de lire la Convention collective et vous la faire expliquer au lieu de perdre votre temps et l’argent des contribuables en poursuites futiles et frivoles.  
Pour cet automne, le directeur des études, l’adjoint à l’organisation scolaire Grandpied et moi-même avons décidé d’une stratégie contre le Littéraire qui devrait enfin donner des résultats. Voici notre plan qui ne peut pas rater. Le directeur des études écrira une lettre d’avertissement demandant au professeur de français de respecter son plan de cours, de donner des cours magistraux et de cesser d’attaquer l’administration devant ses élèves. Des parents nous ont souligné des lacunes sur ces trois points. Cette lettre le mettra en colère. Il se demandera : que me veut le directeur des études ? S’agit-il d’une lettre de doléances comme le mentionne la convention collective au chapitre des mesures disciplinaires ? Nous maintiendrons un flou artistique de manière à l’inquiéter et à l’irriter. Puis, l’adjoint à l’organisation scolaire Grandpied lui donnera un local au premier étage juste au-dessus des travaux entrepris au sous-sol pour le programme en environnement. Comme par hasard, son horaire coïncidera avec les travaux les plus bruyants. Il dira à ses élèves : Ils sont incapables de planifier les travaux ; ils avaient tout l’été et ils viennent me déranger pendant mes cours après m’avoir demandé de donner des cours magistraux, ce qu’on ne peut faire dans le bruit. Ensuite, on attendra le moment le plus opportun pour frapper : sans avertissement, deux femmes cadres viendront faire remplir par ses élèves un questionnaire d’évaluation de son enseignement afin de le prendre en défaut. C’est certain qu’il critiquera en parlant d’une administration de broche à foin qui ne respecte pas le travail des enseignants. Attendons la suite : c’est un plan qui ne peut pas rater. On va l’avoir. Cet individu nous a assez causé de trouble. Mes amis libéraux se préparent à fêter. Les bouteilles de champagne sont au réfrigérateur et la glace est prête. Tout le monde se frotte les mains et se félicite de ce complot qui, je le répète, ne peut pas rater.
Et bien ! ce plan a raté. Les dieux sont favorables à mon ennemi. Le Directeur des études a reculé et je me demande pourquoi. Le 9 octobre, les réponses d’une classe de ses élèves au questionnaire passé par deux femmes cadres, sans avertissement, ne sont pas celles que nous anticipions. Le Directeur des Etudes m’informe que le Littéraire professeur de français jouit de l’estime de ses élèves. Ses élèves disent qu’il est un enseignant compétent et dynamique qui sait rendre l’apprentissage de la littérature intéressant. Le directeur des études a l’intention de lui présenter par écrit des excuses. Je trouve son attitude bizarre. Je n’ai plus le choix. Je dois retirer les poursuites. Boutefeu raconte à tout le monde cette visite hypocrite et sournoise de deux cadres dans sa classe et la décrit comme un abus de pouvoir inadmissible, un mois avant le début des procès.

Evidemment, il est très convaincant et nous avons l’air folle. On dit que je suis obsédée et que je m’acharne. On dit même que je suis incompétente et que je manque de jugement comme on l’a fait pour le Directeur des études. Ca va mal. Il est temps d’arrêter tout ce cirque juridique qui se retourne contre moi. Mes amis me le répètent avec insistance et je crois qu’ils ont raison. J’en ai assez. Je ne comprends pas ce qui se passe avec le Directeur des études. A-t-il des remords de conscience ? Pourquoi a-t-il arrêté l’enquête après avoir fait passer le questionnaire d’évaluation dans le premier groupe d’élèves et n’a-t-il pas continué le lendemain dans les deux autres groupes ? Boutefeu est en colère. Il fulmine. Il écume. Toute cette histoire risque de mal se terminer. Le déranger pendant ses cours est pour lui totalement inadmissible. Nous devrons bientôt décider de retirer ou non la poursuite en diffamation du directeur des études contre l’exécutif du syndicat des enseignants. Le procès doit commencer le 4 novembre. Et le directeur des études branle dans le manche.
A propos de ma poursuite de 170,000 $ contre le Littéraire, mon avocat local  a organisé à son bureau une rencontre avec la directrice des ressources humaines, avocate, avec le directeur des études, ex-professeur de philosophie et le président du Conseil d’administration qu’ils appellent le Chasseur, homme d’affaires, pour préparer le procès qui doit avoir lieu le 2 décembre et pour évaluer nos chances de victoire. Si nous gagnons, le syndicat devra payer tous les frais du procès y compris notre avocat. On peut envisager une somme d’au moins 50,000 $ de frais d’avocats plus l’amende à payer pour diffamation. Ce sera un minimum de 225,000 $ en tout et partout.
Quel sera mon témoignage et quels témoins le corroboreront ? Le bureau de notre avocat a fait un travail préliminaire : documents, chronologie, témoignages. Selon notre avocat, le procès sera long et coûteux. Voici quel serait notre plan de match. Nous maintiendrons que Boutefeu a dit : Cette fois-là, vous étiez à jeun ! Nous sommes en guerre. Nous avons le droit d'être machiavéliques. Peu importe ce qu’a dit exactement le Littéraire, nous allons prouver que la rumeur selon laquelle j’exerçais mes fonctions habituellement en boisson s’est répandue comme une traînée de poudre dans la région et dans le collège. Et que cette rumeur diffamatoire m’a beaucoup nui, a porté atteinte à ma réputation et a été amplifiée par mes ennemis. Nous allons ensuite prouver que peu importe ce qu’a dit le Littéraire, ce qu'il a dit est directement responsable de cette rumeur et de sa diffusion. Enfin, nous allons prouver que cela a fait un tort considérable à ma réputation de dirigeante d’une institution post-secondaire et de Présidente du conseil d’administration du Centre Local de Développement en plus de nuire à la réputation du collège et ainsi rendre le recrutement de nouveaux élèves plus difficile. Le syndicat des professeurs devra donc payer une somme d’argent substantielle pour réparer le tort qui m’a été fait et qui a été fait au collège. C’est un plan brillant relativement simple qui devrait marcher.
Les témoins en ma faveur seront faciles à trouver dans le collège et dans la région. Ils n’auront qu’à dire la vérité. En effet, les paroles de Boutefeu m’ont nui et ont apporté de l’eau au moulin des envieux et des jaloux qui souhaitent ma chute parce que je suis prospère et flamboyante. Ces paroles ont aussi scandalisé ceux qui me respectent. Elles m’ont empêché d’exercer mes fonctions dans la sérénité à laquelle j’ai droit. Nous ferons une preuve de caractère contre Boutefeu, le Diffamateur en démontrant que, depuis toujours, Le Littéraire manque de respect envers les autorités et ne remplit pas les obligations d’un employé envers son employeur. Même si nous retirons la poursuite du directeur des études, ce qui n’a pas encore été décidé, nous nous en servirons pour souligner que les accusations de double incompétence et de manque de jugement permettent de déceler un pattern d’irrespect envers les autorités qui compromet l’harmonie dans le collège et crée un climat de contestation permanente qui rend la vie impossible. Le syndicalisme oui mais l’anarchie, non. Ce sera notre position et le juge l’adoptera, il n’y a aucun doute là-dessus. Je me réjouis à l’idée que les trente ans d’arrogance de Boutefeu se retourneront enfin contre lui. Ce sera une belle vengeance politique. Le pamphlétaire anti-libéral aura enfin reçu la monnaie de sa pièce. Cela servira de leçon aux Pierre Falardeau, Patrick Bourgeois, Victor-Lévy Beaulieu et Léopold Lauzon qui  abreuvent les libéraux fédéralistes d’injures depuis trop longtemps.
Nous avons essayé de prévoir leur riposte. Et là ça s’est gâté. Leurs témoins diront que j’ai mal compris les propos du Littéraire et que, même, je les ai déformés. Que ma réaction outrée et les justifications a posteriori que j’ai apportées pour la justifier ont contribué à dramatiser des paroles en soi anodines. Que je suis donc responsable de la propagation de propos dont j’ai déformé le sens. Que mon témoignage du 31 octobre contient deux erreurs graves sur cette fois-là et sur une réunion de département et qu’à la limite c’est une fabrication puisque je n’ai pas tenu compte de la lettre du Littéraire du début de juillet qui précisait toutes les circonstances. Que mon attitude autoritaire, dominatrice, exigeait une réaction syndicale vigoureuse pour que le syndicat des enseignants ne devienne pas un syndicat de boutique. Que ma tentative de détournement de 4.2 professeurs était illégale. Que mon animosité envers un excellent professeur de littérature ne justifie pas les actions de harcèlement faites contre lui spécialement la visite de deux cadres dans sa classe sans avertissement. Que mes accusations frivoles de diffamation ont nui à la réputation d’un enseignant estimé et aimé par ses élèves ( ce qu’a reconnu par écrit le directeur des études) et cela depuis plus de trente ans. Que le Littéraire est docteur en lettres et n’a cessé de se perfectionner pour donner un meilleur service aux élèves en plus d’avoir écrit cinq livres. Que son engagement politique en faveur de l’indépendance a beau ne pas plaire aux Libéraux, il est légitime et est approuvé par la Cour suprême et par 2.3 millions de Québécois soit presque    50% de la population qui ont voté OUI au référendum de 1995. Que les opinions du syndicat et les publications de la Sentinelle et du Huissier peuvent entrer dans le cadre d’un exercice normal de la liberté d’expression prévue dans les chartes des droits et libertés. Ils trouveront facilement plusieurs témoins qui démoliront la preuve par le caractère. Le Syndicaliste, avec beaucoup de crédibilité, tracera un beau portrait de son ami le Littéraire tout en expliquant que l’image négative que nous avons de lui est le résultat d’une opposition entre fédéralistes de la clique et indépendantistes, les fédéralistes abusant de leur pouvoir pour se venger parce qu’ils se croient les maîtres d’une région.
Mes deux avocats m’ont conseillé d’aller de l’avant avec le procès. Le directeur des études qui me semble de moins en moins soumis et le président du Conseil d’administration dit le Chasseur qui n’est pas fédéraliste ont été d’un avis contraire. Leur argument massue fut que ce procès mobiliserait les énergies de toutes les parties et créerait un climat d’animosité permanente pendant des mois et des mois. Imaginez que les enseignants décident d’assister en grand nombre au procès dans un mouvement de solidarité au lieu de donner leurs cours. Ce serait le chaos. Les médias nationaux s’empareraient de l’affaire. La partie syndicale évoquera deux cas de SLAPP, de poursuites-bâillons, ce qui sera spectaculaire. De plus, ont-ils dit, et cela a provoqué chez l’avocat local une sainte colère, votre avocat a déjà montré un échantillon de son pathos dépassé et de son éloquence douteuse digne des Belles histoires des Pays d’en Haut quand il a demandé au juge de faire cesser ces injures et ces vomissements. Ça ferait un beau procès mais avons-nous besoin de ce genre de spectacle et de ce genre de publicité. Non, il faut faire passer le collège avant tout désir de vengeance personnelle. Le président du CA qui est souverainiste et qui est plutôt bien disposé à l’égard de Boutefeu a été catégorique. Le Littéraire en 30 ans d’affrontement avec l’administration n’a jamais fait d’attaques personnelles. La preuve de caractère pourrait bien se tourner contre nous. On va passer pour des intolérants avides de censure et de vengeance à connotation politique. Réfléchissons bien avant de nous lancer dans pareille aventure. Et n’oubliez pas que nous avons reçu la visite du huissier : ils ont jusqu’en janvier pour nous poursuivre. Si nous continuons, ils nous poursuivront. Et il y a le Tribunal du travail et les griefs qui nous réclament 55,000 $. Ils vont se battre comme jamais et il est impossible que nous ayons gain de cause sur tous ces fronts. Eux, ils ne lâcheront pas. Vous les connaissez. Ce sont des pugnaces, des tenaces et des coriaces. Et c’est le syndicat qui paie leurs frais d’avocat. Ils vont nous poursuivre.
Le Directeur des études m’a particulièrement tombé sur les nerfs. Il m’avait averti que le coup monté contre le Littéraire était extrêmement dangereux. Deux cadres qui envahissent la classe d’un enseignant aux longs états de service sans avertissement, ça ne se fait pas. C’est un manque d’éthique grave trois semaines avant les procès. Et c’est une erreur stratégique majeure. C’est aussi grave que l’erreur de Boutefeu au CA quand il a dit : vous étiez à jeun ! Seulement à cause de cet abus de pouvoir, on doit cesser le combat et retirer les deux poursuites. Même si on sait que cet enseignant fait des remarques sur l’administration dans ses classes, ce n’est pas une raison suffisante pour lui tendre des pièges et le harceler. Ses élèves ont beaucoup d’estime pour lui. Le Directeur des études a insisté par écrit pour répéter que le Littéraire était un excellent professeur de littérature, compétent et vivant et qu’il ne fallait pas s’arrêter à son apparente désinvolture qui n’est là que pour détendre l’atmosphère et favoriser les apprentissages. Ma foi du bon Dieu, mon directeur des études a une certaine admiration pour lui. Il me laisse pratiquement tomber : il veut retirer sa poursuite. Même si j’ai autorité sur lui, je ne peux lui imposer de maintenir sa poursuite. Je n’en ai plus l’autorité morale.
J’ai écouté très attentivement les arguments de part et d’autre. Aurions-nous l’énergie que ça prend pour deux ans de procès ? Je sais que je pourrais gagner mon procès. J’en suis même certaine. Mais à quel prix pour la paix sociale ? L’avocat syndical a dit à mon avocat qu’il irait jusqu’en Cour suprême. C’est toute mon administration que le syndicat remettra en question. C’est mon procès qu’ils feront. Ils rendront publique une nouvelle synthèse des reproches qu’on peut me faire. Est-ce que j’ai besoin de cette nouvelle épreuve ? De plus, j’ai reçu un téléphone du Ministre de l’Education Sylvain Simard  qui est député du comté de Richelieu. Il me demande d’être raisonnable et de penser au bien commun. Comme le gouvernement du Parti québécois a donné une subvention d’un million de dollars pour l’aménagement au sous-sol du laboratoire du programme environnement-santé-sécurité, je dois tenir compte de son avis. Je me suis demandé si le Ministre avait rencontré les leaders du syndicat ? Il a hésité mais il m’a avoué la vérité. Le Littéraire et l’Irlandais ont plaidé leur cause devant le Ministre qui a dit comprendre le point de vue syndical. Je constate que mes adversaires sont actifs à tous les niveaux pour que je retire les deux poursuites qui sont faites au nom du collège ne l’oublions pas. Il va bien falloir un jour que je cesse mes vexations et mes brimades contre le Littéraire. C'est ce que me dit le Ministre de l'éducation avec courtoisie mais avec fermeté.
Après une semaine de réflexion, de guerre lasse, nous avons négocié un Règlement hors cour qui implique, de leur part, le retrait des griefs, de la plainte au Tribunal du Travail et de la menace de poursuites pour diffamation et, de notre part, le retrait des deux poursuites judiciaires. Le tout signé le 30 octobre 2002 avec un protocole où chaque partie s’engage au respect mutuel et au respect des personnes. L’avocat syndical Jacques Lamoureuxù et le représentant de la Fédération ont fait la navette de mon bureau au local syndical pour ficeler l’entente et obtenir les signatures. Ils ont refusé de s’engager à la confidentialité. De toutes façons, tout a été rendu public dans la région et c’est de peine et de misère que j’ai réussi à empêcher que le conflit ne se rende dans les journaux nationaux. Les membres de l’exécutif syndical ont refusé de venir dans mon bureau; ils ont refusé de me serrer la main et de serrer la main de l’avocat local et de l’avocate, directrice des ressources humaines. C’est de mauvais augure. Le coup des deux cadres dans sa classe, le Littéraire ne nous le pardonnera jamais.  Le directeur des études, avant de quitter pour un autre collège (il ne m’en avait pas parlé avant), a écrit une lettre d’excuses à l’enseignant pour avoir dérangé le déroulement normal de ses activités et pour les inconvénients que cela a pu lui causer. Ces excuses sont précédées d’un éloge du Littéraire professeur de français dont on aurait pu se passer. J’ai compris, plus tard, ce qui se passait. Le directeur des études avait entrepris des démarches secrètes pour être engagé comme directeur des études au collège où il avait enseigné la philosophie pendant vingt ans. Il ne tenait pas à ce que le dossier de l’enseignant reconnu pour sa pugnacité le suive à son nouvel emploi. Il voulait tourner la page. Il a fait des démarches pour changer de collège sans que je le sache. Comment pouvais-je prévoir que mon allié de toujours me laisserait tomber. Comme aurait dit le syndicat : Il a cessé de faire la belle devant sa souveraine. Cet abandon est la cause principale de notre échec. J’ai été trahie. Je suis déçue. On ne peut se fier à personne. Je me suis dit qu’un ancien professeur de philosophie ne peut être soumis très longtemps.
A la suite de cette entente hors cour, j’espérais sans trop y croire que nous aurions enfin la paix. Or, dans l’irrespect total de l’entente signée le 30 octobre 2002, l’Huissier du 25 février 2003 sous la signature des quatre membres de l’exécutif du syndicat, entreprend d’expliquer pourquoi il y a eu deux poursuites. Ils écrivent qu’avant d’aller plus loin, il faut comprendre les motivations de la directrice générale. C’est une attaque en règle. C’est une synthèse virulente de ce qui s’est passé. C’est du harcèlement. Selon eux, mon but avec les poursuites était d’échapper à l’évaluation des enseignants qui voulaient m’empêcher d'obtenir un deuxième mandat de cinq ans. Enumérant tous les départs parmi les cadres, il concluent que le Syndicat n’est pas le seul à avoir de la difficulté à travailler avec la directrice générale. Avec une citation de Montaigne, encore et toujours. La voici :
L’obstination et une façon de débattre têtue et impérieuse pleine d’opiniâtreté est la plus sûre preuve d’incivilité et d’inimitié. Si elle se rabaisse à la conférence commune et qu’on lui présente autre chose qu’approbation et révérence, elle vous assomme de son autorité.
S’en suit le reproche d’avoir gaspillé des fonds publics (50,000 $) en frais d’avocat à des fins personnelles dans un abus de pouvoir sans précédent. Un éloge est fait de la stratégie des boycotts que le syndicat entend continuer à appliquer pour protester contre une augmentation de la tâche de 173 heures par année soit cinq heures par semaine de disponibilité dans le cadre de la restructuration salariale. Ils se félicitent d’avoir défendu la liberté syndicale contre les agressions patronales et remercient de leur solidarité les membres du syndicat, la Fédération autonome du collégial,  ses services juridiques et les dix-sept syndicats qui les ont appuyés moralement et financièrement. 
Pour ajouter l’insulte à la blessure, ils ont envoyé cette analyse aux 17 directeurs généraux et aux 17 directeur des études des collèges de la Fédération, à tous les syndicats de la Fédération ainsi qu’à tout le personnel du collège et aux 18 membres du Conseil d’administration. Ils ont appris que j’avais des ambitions du côté de la Fédération des collèges et ils veulent me nuire. Ça ne peut plus continuer. Il faut que les quatre membres de l’exécutif du syndicat quittent leur poste. Je vais les forcer à démissionner en les poursuivant pour une troisième fois pour avoir écrit et diffusé un bulletin syndical diffamatoire qui ne respecte pas du tout la lettre et l’esprit de l’entente hors cour qu’ils ont signée. Etant donné le droit inaliénable de toute personne à sa dignité, à son honneur, à son intégrité et à sa réputation, il y a urgence d’agir afin que cesse cette conduite destructrice et inacceptable qui est hautement nuisible au Collège. Cette fois-ci, j’aurai leur peau d’autant plus que beaucoup d’enseignants en ont assez eux aussi de ce conflit qui s’éternise et nuit au Collège. Je les obligerai à se mettre à genoux devant moi et à démissionner de l’exécutif syndical. A ce moment-là, le Littéraire prendra sa retraite et nous aurons enfin la paix.
Une résolution dans ce sens a été présentée au Conseil d’administration du jeudi 27 mars 2003. Après un débat à haute teneur émotive, en partie à cause de l’opposition de la représentante du personnel de soutien, Lise Latraverse, l’unanimité n’a pas été obtenue sur la nécessité d’entreprendre immédiatement des procédures judiciaires contre les auteurs du Huissier du 25 février 2003. Le Conseil d’administration s’est contenté de réitérer sa confiance envers la direction du collège, de blâmer la conduite des membres de l’exécutif du syndicat des enseignants, d’exiger que les membres de l’exécutif du syndicat des enseignants respectent leurs engagements et cessent tout harcèlement envers la direction du Collège. Les nouvelles procédures judiciaires seront prises plus tard, au besoin, non par l’exécutif du Collège dont je fais partie et que je contrôle mais par le Conseil d’administration de 19 personnes de nouveau réuni. Pour échapper à une poursuite, l’exécutif du syndicat, après avoir répandu son venin au collège et dans tout le réseau collégial, n’avait qu’à exprimer son accord avec les membres du Conseil qui souhaitent que nous passions tous à autre chose. C’est ce qu’il a fait en montrant hypocritement patte blanche dans un numéro du Huissier daté du 25 avril 2003.
C’est pour moi une grave défaite. Je ne peux plus continuer.  Je commence à penser à ne pas terminer ce mandat pour lequel je me suis tant battue et à préparer ma retraite. Je suis obligée d’admettre que j’ai perdu. Si le Conseil d’administration m’avait appuyée à l’unanimité, je gagnais la guerre car une troisième poursuite contre les quatre membres du syndicat des enseignants aurait signé leur arrêt de mort : l’ensemble des enseignants aurait refusé de les suivre après le Huissier du 25 février 2003 qui était du harcèlement contraire à l’esprit du Règlement hors cour. Même la Fédération autonome des syndicats aurait eu des difficultés à les appuyer. Mais je me suis heurtée à l’obstination de la représentante du personnel de soutien qui est une amie de l’Ebéniste puisqu’elle a été son adjointe au laboratoire de biologie pendant plusieurs années.  Elle en a sans doute profité pour protester à sa façon contre les coupures de postes que j’avais faites parmi les employées de soutien. Parce que je voulais les poursuivre pour la troisième fois, mes ennemis m’ont qualifiée d’obsédée des tribunaux. Dans le jargon juridique, je serais une quérulente (du latin querulus, qui se plaint) qui multiplie les recours vexatoires en revenant toujours sur les mêmes questions afin d’empoisonner la vie de ceux qui sont mes cibles. Je serais donc, selon mes adversaires, une quérulente qui fait preuve d’impéritie et qui est une adepte des poursuites-bâillons.
J’ai été sage de prendre ma retraite après avoir constaté que le Conseil d’administration ne m’appuyait plus parce qu’après l’entente hors cour, les attaques continuant de plus en plus féroces, les administrateurs n’ont pas compris qu’on était engagé dans une lutte sans merci. Je m’inspire moi aussi de Montaigne qui a écrit un texte qui s’intitule : 
On est puni pour s’opiniâtrer à une place sans raison. 
La vaillance a ses limites, comme les autres vertus ; lesquelles franchies (...) on peut se rendre à la témérité, obstination et folie. (....) De cette considération est née la coutume que nous avons aux guerres, de punir (...) ceux qui s’opiniâtrent à défendre une place qui par les règles militaires ne peut être soutenue.
Après avoir ragé et informé mes amis libéraux réunis chez moi d'oublier le champagne, il m’a fallu beaucoup de réalisme et d’humilité pour accepter que le jugement de la valeur et faiblesse du lieu se prend par l’estimation et contrepoids des forces qui l’assaillent. Il n’était pas question que je tombe dans la témérité, obstination et folie et que je m’opiniâtre à rester à mon poste.

Après le départ du directeur des études qui m’a laissée tomber, de ma directrice des ressources humaines qui m’a été fidèle jusqu’au bout, du directeur des ressources matérielles dont l’ambition l’a mené ailleurs et des adjoints et adjointes au directeur des études, ma dernière année à la direction s’est passée en chicanes autour des 173 heures d'augmentation de la charge des enseignants et en affrontements sur la réforme des collèges sur fond de boycotts de plus en plus paralysants et insupportables. Comme je l’avais prévu, le retrait des poursuites n’a rien réglé : le climat de travail est resté malsain et c’est le syndicat des enseignants qui en est responsable. J’ai encouragé un certain nombre d’enseignants qui en avaient assez des boycotts à former une nouvelle équipe syndicale qui aurait pour but de déloger mes adversaires. Certains enseignants ne voient pas en quoi le boycott du party de Noël fera avancer leur cause. Par des interventions en assemblée syndicale, ils commencent à s’opposer à l’exécutif actuel. On m’a informé qu’Amable Beausapin, un technicien (enseignant) en électrotechnique, ami de la directrice des ressources humaines, a attaqué ceux qu’il appelle avec mépris les vieux et leur a demandé de laisser la place aux jeunes. Il les a aussi accusés d’utiliser des moyens de pression faibles comme les byecotts comme il le dit, au lieu de faire la grève et il a ajouté que ce sont des péquistes avant tout et non de vrais syndicalistes. C’était pas mal fort comme attaque. Mais même mon professeur d’histoire préféré  donneur de cours magistraux mur à mur qui a gagné des prix pour la qualité de son enseignement a trouvé que la diatribe d’Amable était malhabile. Tout de même, ils réussiront peut-être là où j’ai échoué. Ce sera ma vengeance en quelque sorte. Ce que je souhaite, c’est que mes adversaires invétérés soient battus aux prochaines élections syndicales.
Je quitterai le collège avec soulagement. J’ai fait plus que mon possible mais comme le dit le fils de l’homme d’affaires le plus important de la région : c’est pas drôle d’être directrice générale d’un collège qui a ce genre d’individus dans le personnel. Je partirai la tête haute, deux ans avant la fin de mon mandat, avec une prime de séparation respectable et une pension plus que convenable. Heureusement que mes adversaires n’habitent pas dans la région. Malgré toutes les calomnies dont j’ai été l’objet, je jouis toujours de l’estime de mes concitoyens qui savent bien, eux, combien j’ai à coeur le développement de la région. Je l'ai prouvé et je continue à le prouver.
Ainsi s’achèvent ces confidences qui donnent ma version des événements qui ont marqué mon passage au collège comme directrice générale. Je les ai écrites, je le répète, avec toute l’honnêteté dont je suis capable. Dans une guerre, il n’est pas facile de déterminer qui a raison. Cependant, il y a une chose qui devrait faire l’unanimité. Pendant sept ans, les deux parties ont parfaitement réussi à s’empoisonner réciproquement la vie. Je ne suis pas sûre que ni l’un ni l’autre ne doive en être fier. J’ai ma part de responsabilité. J’ai toutefois l’impression qu’ils se sont plus amusés que moi car il est plus facile de s’opposer que de bâtir. J’ai été une rude adversaire et, je l’avoue, j’ai utilisé des tactiques discutables pour nuire à mon ennemi numéro un. J’admets que je suis loin d’être certaine que Le Littéraire a prononcé la fameuse phrase Cette fois-là, vous étiez à jeun qui l'aurait incriminé.  De toutes façons, comme il a répété cent fois ne pas l’avoir prononcée à quiconque voulait l’entendre, d’une certaine façon, ma réputation est sauve quoiqu’il ait dit aussi à chaque fois que nous l’avions inventée, fabriquée, ce qui ne plaidait pas en ma faveur. Mais, en conclusion, un observateur objectif conclura que le harcèlement a été des deux côtés. Le conflit que nous avons vécu est un bel exemple des conséquences sur la vie professionnelle d’oppositions politiques entre des individus ayant des options différentes quant à l’avenir du peuple québécois. 
Une question pour finir : est-il possible à une direction d’exercer normalement ses fonctions quand un petit groupe coriace essaie de lui faire perdre sa crédibilité en la déstabilisant par des critiques incessantes utilisant des mots blessants, méprisants, insultants et même diffamatoires ? Sur la question des propos diffamatoires, il n’y aura malheureusement aucun juge de la Cour supérieure pour trancher. Qui pourrait dire avec certitude que le juge ne nous aurait pas donné raison ? Nous ne le saurons jamais. Comme nous ne saurons jamais si la Commissaire au Tribunal du travail aurait donné raison au syndicat ainsi que l’arbitre des griefs. Mais une chose est certaine: j’ai été trahie par le directeur des études et par le Conseil d’administration qui ne m’ont pas appuyée jusqu’au bout. Au moment crucial, ils m’ont laissée tomber. C’est triste car j’aurais gagné si les gens s’étaient tenus debout. Mais j’ai quand même eu ma revanche.
En effet, tel que je le souhaitais, ceux que j’ai encouragés à se présenter aux élections du syndicat des enseignants ont formé une équipe qui a vaincu 43 à 36 ceux qui n’ont cessé pendant sept ans de me contrarier. Le Syndicaliste, revenu au collège, et son équipe dont le Politique faisait partie, ont été battus. (En partie parce que l'exécutif syndical a rendu public une attaque en règle contre les enseignantes de Bureautique qui ont mis à la porte un enseignant compétent.)   Cela veut tout de même dire quelque chose ! Si le Littéraire s’était présenté à la vice-présidence contre notre ami Amable Beausapin qui a été le brillant architecte de cette victoire, il aurait subi une défaite humiliante contre un adversaire qui, selon lui, aurait dû rester technicien. Mais il a eu peur de perdre et ne s’est pas présenté, lui le guerrier sans peur et sans reproche. Quel pissou ! On peut conclure avec certitude que sa politique d’opposition à mon endroit a été rejetée puisque ses amis ont été battus. Tout le monde a compris que c’est lui qui a subi la défaite car dans sa tournée pré-électorale des départements, Amable Beausapin s’est servi d’un texte dont le Littéraire était l’auteur qui continuait à m’attaquer à cause de mon adhésion aux quinze orientations de la Fédération des cégeps et parce que, lors d’une rencontre inter-syndicale, j’avais traité de malhonnête intellectuellement un professeur d’anglais qui me faisait un procès d’intention. Amable s’est promené dans le collège en disant : Vous êtes pas tanné de ces attaques continuelles et de ces "byecotts" inutiles ? Malgré sa crédibilité et sa compétence, le Syndicaliste qui a été huit ans vice-président de la Fédération (qui a financé mes adversaires) et président du syndicat de notre collège pendant des années a mordu la poussière. Les vainqueurs avec Amable en tête ont fêté à l’Université, une brasserie où se réunissent les membres de l’élite de droite, et je me suis retenue d’aller célébrer avec eux mais ils savaient que je les félicitais de leur belle victoire qui est aussi la mienne.  Je leur ai fait parvenir mes félicitations par un messager de mes amis. Amable avait rendu la marchandise après que l’administration eût favorisé son passage de technicien à enseignant avec tous les avantages monétaires que cela implique selon la philosophie qui m’est chère du donnant-donnant. Au fond, un technicien en électro qui ne connaissait rien à la convention collective des enseignants s'est emparé de l'exécutif syndical et a été l'architecte de l'humiliation de mes adversaires.
En conclusion, j’ai été obligée de subir les vexations de deux scribouilleurs pendant sept ans. De leurs méfaits, de leur virtuosité verbale, il ne reste rien, que du vent sauf peut-être quelques citations de Montaigne qui n’avaient pas besoin d’eux pour résister au temps.
Parlant de Montaigne, je terminerai par une citation qui s’adresse à ceux qui veulent se séparer du Canada. Ils diront que c’est le coup de pied de l’âne final mais tant pis.
Selon Montaigne, l’innovation est dangereuse aux Etats. C’est dans le chapitre IX du livre trois des Essais.
Ce texte de Montaigne qui fait de lui un conservateur, c’est ma réponse à ceux qui veulent sortir du Canada, mon pays. Puisqu’ils veulent faire de la politique, faisons-en. Citons Montaigne.
Non par opinion, mais en vérité, l’excellente et meilleure police (gouvernement), est à chacune nation, celle sous laquelle elle s’est maintenue. Sa forme et commodité essentielle dépend de l’usage. Nous nous déplaisons volontiers de la condition présente (…) Aime l’Etat tel que tu le vois être.  S’il est royal, aime la royauté. S’il est de peu, ou bien communauté, aime-le aussi, car Dieu t’y a fait naître.
(…) Rien ne presse un Etat que l’innovation : le changement donne seul forme à l’injustice, et à la tyrannie. Quand quelque pièce se démanche, on peut l’étayer : on peut s’opposer à ce que l’altération et corruption naturelle à toutes choses, ne nous éloigne trop de nos commencements et principes . Mais d’entreprendre à refondre une si grande masse, et à changer les fondements d’un si grand bâtiment, c’est à faire à ceux qui pour décrasser effacent : qui veulent amender les défauts particuliers, par une confusion universelle (…).
Car le bien ne succède pas nécessairement au mal : un autre mal lui peut succéder et pire. Comme il advint aux tueurs de César, qui jetèrent la chose publique à tel point, qu’ils eurent à se repentir de s’en être mêlés. A plusieurs, depuis, jusques à nos siècles, il est advenu de même. Les Français mes contemporains savent bien qu’en dire. Toutes grandes mutations ébranlent l’Etat, et le désordonnent. 
Si le Littéraire est vraiment un disciple de Montaigne, qu'il le soit jusqu'au bout et qu'il renonce à l'indépendance du Québec, cette grande mutation qui ébranlerait l'Etat du Canada et nous plongerait tous dans une confusion universelle. On m'accusera de ne pas tenir pas compte du contexte des guerres de religion entre catholiques et protestants. Mais pensez-y et vous verrez que j'ai raison. En tout cas, il y a matière à réflexion pour un admirateur de Montaigne.
Que dira le Littéraire de ces confidences qui lui serviront de prétexte pour me comparer à Philaminte, la sympathique, intelligente et ambitieuse despote des Femmes savantes de Molière ? Je sais très bien que je ne suis pas un écrivain mais je sais communiquer et me faire comprendre. Pourvu qu’on me lise avec une certaine ouverture d’esprit. Je n’ai pas fait état de toutes mes réalisations qui sont considérables mais qu’il n’était pas approprié d’énumérer dans un écrit intime comme le sont ces Confidences que je suis sur le point de terminer. Oui, j'ai été une femme trahie mais je n'en ferai pas une maladie.
Je pense au plaisir que j’éprouverai ce soir à raconter, le verre de vin à la main, à mes amis Louise K., mon adjointe préférée, et André L., l'assureur millionnaire, ce dernier pavé tiré des Essais de Montaigne lancé dans la mare des ardeurs militantes du Littéraire-Boutefeu qui sont d’ailleurs les dernières ardeurs qui lui restent avant que ses problèmes de plomberie  n’atteignent son moi hypertrophié, ce qui ne saurait tarder.
Je laisse le Littéraire avec ses problèmes de virile plomberie.

Toutes grandes mutations ébranlent l’Etat, et le désordonnent a écrit Montaigne. Ce qui veut dire que si Montaigne avait été notre contemporain, il aurait été conservateur et fédéraliste partisan du statu quo et pas du tout indépendantiste. C’est mon interprétation et je persiste et signe.

Françoise R.
Ex-directrice générale  et présidente d’un FIER.
( juillet 2006 à septembre 2017-10 mai 2019)  
Fin

p.s.
Voici une lettre que j'ai reçue qui a été signée par douze élèves, six garçons et six filles parmi les  plus brillants du collège. Elle confirme la bonne opinion que somme toute je me faisais du Littéraire comme enseignant. Je la rends publique par honnêteté intellectuelle sans mentionner les signatures. Et pour qu'on comprenne que notre collège donne aux élèves un enseignement de qualité…malgré les conflits. 
Sorel-Tracy
Madame la directrice,
Nous avons eu la chance d'avoir monsieur Robert B. comme professeur de français lors de la dernière session dans un cours complémentaire sur les chefs-d'oeuvre de la littérature universelle.
Comme nous avons entendu parler des querelles entre vous et lui et sans que nous prenions position sur des sujets que nous ne connaissons pas, nous tenons à exprimer toute l'estime que nous portons à notre professeur de littérature. Nous avons étudié le tragique dans Oedipe-Roi de Sophocle, l'Oeuvre au noir de Marguerite Yourcenar et les Ecrits de prison de Chevalier De Lorimier; nous avons étudié l'épique dans l'Odyssée d'Homère et Menaud maître-daveur de Mgr Félix-Antoine Savard. Après l'examen final, nous sommes allés serrer la main de notre professeur pour le remercier du cours qu'il nous a donné. Nous voulions par ce geste protester contre les langues sales, les gourous du programme d’Arts et Lettres qui avaient tenté de dénigrer cet homme compétent, cultivé, chaleureux et généreux qui aime ses élèves. L'atmosphère d'hostilité créée par certains de ses collègues envieux, hypocrites et mesquins qu'il a dissipée par son humour et sa compétence nous a fait encore plus apprécier la richesse de son cours car nous avons dû  surmonter cette négativité pour pouvoir porter notre propre jugement. Le dénigrement de cet excellent professeur par certains de ses collègues nous a dégoûtées et nous a convaincues qu'il faut toujours se faire son propre jugement.

Le hasard a fait que nous avons récemment vu le film La société des poètes disparus avec Robin Williams dans le rôle du professeur. 
Nous avons immédiatement fait un rapprochement entre notre professeur et le professeur interprété par l'acteur Robin Williams. 

Et nous tenions absolument à ce que vous le sachiez.  Suivent douze signatures.

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